Découvert à travers ses deux Palmes, relativement tardives dans sa carrière, le « choc » Imamura, c’est surtout la découverte de ses films écrits et réalisés dans les années 60. La nouvelle vague japonaise a permis à quelques cinéastes fous de s’exprimer, parfois pour le pire, mais Imamura a beau proposer des histoires de « dingues », ses récits sont toujours parfaitement millimétrés, d’une densité rare qu’il abandonnera plus ou moins par la suite. Sa réalisation est nerveuse sans être trop portée sur l’invention ou les procédés : tout concourt chez Imamura à mettre en scène (littéralement) une histoire. Et quand le bonhomme est également (contrairement à d’autres cinéastes de « nouvelle vague ») scénariste, on comprend qu’on à affaire à un véritable auteur.
(Revu). Disperser aux quatre vents les fils d’une même pelote, se libérer du rouet du temps, tirer sur le nœud ombilical, et devenir… fil prodigue.
Une femme dont on parle
Au-delà de l’intrigue amoureuse, comme un refrain qui s’entête : quand les femmes cesseront-elles d’être obligées d’en passer par là.
Mizoguchi terminera sa carrière là-dessus, sur ce même refrain cette fois dépouillé d’une intrigue principale pour se concentrer sur la vie et la condition des femmes de bordel. Déjà, la même fin désillusionnée sur… La Rue de la honte. Et la même innocence venant se jeter dans la gueule du loup. La composition de Kinuyo Tanaka est tout bonnement exceptionnel, comme d’habitude.
La Dame de Musashino
Sac de nœud sentimental et cornélien opposant les valeurs d’un Japon vaincu à celle d’un monde où les amours se consomment comme le reste. Plutôt réussi.
La Victoire des femmes
Film féministe pour obéir aux désirs de l’occupant. Mise en place laborieuse, mais l’opposition gagne en tension dès que le procès commence.
Mizoguchi semble s’ennuyer à filmer en intérieurs. Sa lenteur, ses plans-séquences et ses travellings ne sont pas fait pour ça. En revanche, c’est parfait pour les scènes de tension, les actrices ayant tout loisir de montrer l’étendue de leur génie. (Un film auquel répondra un peu plus tard Flamme de mon amour, lui aussi dans une veine soft power au profit des valeurs libérales de l’occupant. Faudra attendre encore pour ressortir les jidaigeki des placards, avec La Vie d’O’Haru femme galante en 51, précédé en 50 par Kurosawa et son Rashomon.)
Les Femmes de la nuit
Le génie de Mizoguchi et de Kinuyo Tanaka au service de la propagande anti-prostitution de l’occupant. Naruse s’en tirera mieux (avec La Bête blanche).
Une demi-douzaine d’années que l’occupation a pris fin, et personne ne semble en avoir informé Imai. (Le Sifflement deKotande Naruse, avec ce même thème de l’étranger de l’intérieur, est plus subtil.) Imai en petite forme.