Institut Benjamenta, les frères Quay (1995)

Note : 2.5 sur 5.

Institut Benjamenta (ou ce rêve qu’on appelle la vie humaine)

Titre original : Institute Benjamenta, or This Dream People Call Human Life

Année : 1995

Réalisation : les frères Quay

Avec : Mark Rylance, Alice Krige, Gottfried John

Le passage de l’animation au film en prises réelles, ou du court-métrage au long, parfois même aussi du film expérimental au film narratif, est toujours une entreprise périlleuse pour qui s’y aventure, et dans ce registre, le premier long de Stephen et Timothy Quay, auteurs remarqués de films d’animation expérimentaux, est à ranger parmi les réussites mitigées de l’histoire du septième art. Ce passage nécessite souvent certains aménagements pour se conformer aux attentes d’un public différent, moins exigeant, et on sait que parfois cela nécessite des ajustements plus radicaux qu’on peut rarement obtenir lors d’un premier long. On se souvient par exemple, dans un autre style, mais peut-être avec le même type de difficulté, qu’il aura fallu que Jeunet s’émancipe de plus en plus de Caro pour gagner en visibilité. Il faut en tout cas beaucoup de talent(s) pour parvenir à ce qui peut ressembler pour beaucoup à un écueil impossible à dépasser.

De talent, les frères Quay en ont assurément, mais au vu de ce premier long, je crains qu’il leur manque encore le nécessaire pour se frotter à des domaines, des techniques, des impératifs, qu’ils pouvaient laisser de côté pour des courts-métrages d’animation expérimentaux.

La première difficulté est peut-être d’arriver à garder un style propre, faute de quoi, en plus de ne pas trouver un nouveau public, on s’éloigne de celui, souvent de niche, qui nous connaît et nous apprécie pour la marque bien spécifique qui a fait notre style. Je n’ai vu qu’un court des frères Quay, mais au moins sur ce point, il semblerait qu’il n’ait pas trop eu à travestir leur talent pour s’attaquer au long. La force des frères Quay réside sans aucun doute dans l’imaginaire, le foisonnement étrange, lumineux, féerique de leur scénographie. Et cela, même avec un film largement tourné en prises réelles, c’est un style qu’on reconnaît au premier coup d’œil. Les frères Quay ont choisi de filmer en noir et blanc, en studio, et de placer leur histoire dans une période mal définie, peut-être même résolument intemporelle, et située dans un espace, un pays, pas plus identifiable (tout fait penser, dans les noms, les manières, à quelque chose de germanique, et c’est adapté de Robert Walser, auteur suisse de contes et nouvelles du début du XXᵉ siècle, mais l’univers recomposé semble largement fantasmé par les frères Quay). Le principal intérêt du film, et sa force pour certains, provient incontestablement de son pouvoir évocateur, sensoriel, de son imagination, de ses reconstitutions surréalistes d’un monde évoquant parfois Kafka.

Le hic, quand on en arrive là je dirai, ce qu’on n’en est encore qu’au début du chemin. On ne fait qu’entrer dans les forêts, et les dangers y sont nombreux… Le premier écueil, le principal à mon sens, c’est le passage du film expérimental, animé souvent d’une maigre intrigue prétexte à toutes les possibilités visuelles, à un film narratif. L’idée d’adapter un texte préexistant était probablement un bon réflexe plutôt que de s’essayer maladroitement à en écrire une, mais au lieu de s’en servir, c’est un peu comme si les frères Quay avaient cherché le plus possible à s’en écarter, afin d’avoir toujours autant recours à des éléments non narratifs. Ce qui aurait pu passer pour une astuce, dans l’exécution, devient au fur et à mesure comme un moyen d’échapper à un univers (le récit) qui ne leur appartient pas, et dont ils n’osent se rendre maîtres. Ils font en quelque sorte le pari qu’un spectateur pourra suivre la suite des éléments narratifs parsemés ici ou là comme le ferait le Petit Poucet pour ne pas nous y perdre, tandis qu’eux vagabonderaient plus librement sans ne plus avoir à se soucier de cet élément moteur d’un film qu’est la narration.

Ainsi, volontairement, le récit est perpétuellement évanescent, proche du rêve, et se proclamant volontiers influencé par les contes et les histoires féeriques. Cela en devient à la fois la qualité (visuelle) du film et son principal défaut. Un défaut qu’on pardonnerait tout à fait si le film ne les multipliait pas par ailleurs et si au-delà de cela, il y avait du génie chez les frères Quay qui forcerait le respect et une certaine forme de complaisance.

Malheureusement, si les frères Quay peuvent interroger ou émerveiller le regard par leurs dispositifs visuels, on juge un long-métrage sur tout autre chose. En particulier sur des éléments aussi bêtes que la mise scène, le rythme, la direction d’acteurs, la capacité à raconter une histoire, l’alchimie qui peut surgir ou non de ces éléments réunis…

Le principal défaut du film, quand on en arrive à s’interroger sur ce qui pèche, c’est que la mise en scène ne semble se cantonner qu’à un travail de scénographie (d’art direction ou de production designer, pour ses conceptions anglo-saxonnes du terme, englobant tous les aspects visuels d’un film). C’est important quand il est question de créer un univers, de donner à voir au spectateur, le plonger dans une ambiance, mais pour raconter une histoire, il faut également que le dispositif narratif et technique puisse être mis au service d’une action prenant corps et se développant en diverses situations devant nos yeux. Pour cela, le découpage technique doit servir de ponctuation au récit, afin que le spectateur entre petit à petit dans l’univers (narratif cette fois), mais aussi la direction d’acteurs, qui doit donner le rythme, l’élan aux scènes… Et malgré les excellents acteurs, malgré une volonté perceptible de tendre vers un cinéma purement de mise en scène et d’ambiance, ça ne prend jamais, un peu comme une musique qu’on lance et qu’on est obligé de relancer en permanence parce qu’elle n’adopte pas le bon tempo, parce que les musiciens ne partent pas au même moment ou ne jouent pas la même partition. J’aimerais dire que certains savent, connaissent certaines règles de mise en scène permettant de proposer ainsi un cinéma fait d’ambiances, de non-dits, de poésie, mais il est vrai que des cinéastes semblent parfois posséder ce quelque chose sans avoir recours à un quelconque savoir-faire. Certains savent raconter des histoires drôles, d’autres pourront toujours comprendre tous les processus déployés par ces orateurs pour faire rire leur auditoire, ils n’arriveront pas forcément à avoir le même succès. Raconter une histoire, même (il faudrait même dire « surtout ») en choisissant de n’en garder que l’essentiel pour se permettre de montrer « autre chose », « autrement », on sait, ou on ne sait pas. (Il en va de même pour le spectateur d’ailleurs, qui peut être plus ou moins réceptif à telle ou telle manière de raconter. Aucun doute sur le fait qu’un autre spectateur puisse me contredire sur le fait que le film « raconte parfaitement l’histoire choisie ».) Le problème est peut-être moins que les frères Quay ne savent pas raconter comme il le faudrait que le fait qu’ils ne veulent tout bonnement pas prendre le risque de s’y essayer. Proposition intéressante, mais c’est peut-être un peu se défiler : bien sûr, c’est un long, on fait comme si, et en fait, non, pas tout à fait. Courageux, mais chacun pourra décider de la réussite de la proposition.

Dans le détail, les points qui me questionnent : pas de mise en contexte au début du film (du moins, cela reste très vague et insuffisant à mon goût) ; des enjeux de départ qui deviennent de plus en plus fous à mesure que les personnages interagissent ; une psychologie trouble avec des acteurs forçant certaines émotions, mais qui sans mise en contexte ou sans situation paraissent toujours plus confuses et étranges. Concernant le contexte toujours, il me semble préférable, le plus possible, de suggérer l’existence d’un monde extérieur, même sans le montrer, pour faire vivre le hors-champ et faire ainsi confiance à l’imagination du spectateur pour se fabriquer lui-même le film dans sa tête. Même dans un univers carcéral, suggérer l’extérieur peut se faire de différentes manières et apporter beaucoup au récit et au plaisir que prend le spectateur à suivre une histoire, surtout quand elle possède comme ici un tel niveau de fantaisie. Le parti pris des réalisateurs de tourner en studio permet, certes, de tout contrôler et de garantir une constance dans leur style personnel, mais sans faire pour autant de leur film un véritable huis clos, le film pâtit de cet aspect cloisonné, studio, difficilement concevable dans un long-métrage. Il est immédiatement rattaché à un manque de moyens ou d’ambition.

Le choix des prises directes et l’apport d’acteurs d’excellente qualité vont au contraire dans le sens d’une plus grande « démocratisation » du style des frères Quay, mais on les sent malgré tout assez peu à l’aise à les insérer dans leur univers. Certaines séquences se revendiquent du cinéma muet, et même s’il est vrai que certains plans sont joliment structurés, dès qu’il est question d’y mettre du rythme, pour retranscrire au mieux une situation, disposant malgré tout des voix des acteurs, des répliques, bref, toute une partition propre au parlant, plus rien ne marche comme dans un film muet. Autre aspect sonore qui détonne et peine à convaincre : la musique, assez dissonante, qui n’aide pas à entrer dans le film ou à comprendre certaines situations.

Pour le positif, gardons malgré tout en mémoire les excellents décors (la gestion du hors-champ devrait rentrer en compte quand on évoque le « décor ») et surtout la photographie. Nombre de cinéphiles pourraient d’ailleurs se satisfaire de l’univers visuel proposé tant il est vrai qu’il est riche : brillance des éléments humides, rais de lumière dans la poussière, fumigènes éclairés, fausse neige tourbillonnante, reflets scintillants, flous, transparences…, tout y passe. Et c’est en soi une satisfaction.

Le film ressort le 4 décembre à Paris au Reflet Médicis ainsi qu’en banlieue et province.



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IMDb


Roma, Alfonso Cuarón (2018)

Note : 2.5 sur 5.

Roma

Année : 2018

Réalisation : Alfonso Cuarón

Si Cuarón a une qualité, je le reconnais, c’est de savoir mettre ses acteurs en situation. Pour le reste, c’est… à la fois vide de sens et inutilement formaliste (donc prétentieux). Qu’on procède dans un film majoritairement par plans séquences successifs agrémentés ou non de panoramiques robotiques, qu’on englobe tous ses plans dans un grand-angle de carte postale ou encore qu’on affadisse tout ça derrière un noir et blanc comme d’autres se munissent de leurs meilleurs habits pour aller à la messe, pourquoi pas, si au moins toutes ces manières avaient un but et se mettaient au service d’une histoire. C’est peut-être le Long Day Closes de son réalisateur, le Cria Cuervos à la sauce mexicaine, on est surtout dans un vide dramatique inquiétant. D’abord parce que les événements présentés n’ont dans leur ensemble aucun intérêt dramatique particulier, qu’ils n’en ont pas plus à l’échelle de ces longues séquences : tout est anodin, anecdotique, ordinaire. Tout juste y peut-on noter qu’on a affaire à la chronique sans vagues d’une famille aisée du Mexique à laquelle on nous présente les quelques désagréments futiles (entre crottes de chien et abandon du foyer conjugal par le père : je ne cite pas au hasard ces deux événements, on peut presque sourire en pensant que dans son récit Cuarón, involontairement ou non, crée un lien de causalité entre les deux). Bref, ce n’est pas vraiment fait pour nous aider à nous identifier aux personnages et à leur devenir.

D’ailleurs, on ne sait trop bien qui est au centre de la chronique. La bonne, semble-t-il. Pourquoi la bonne plutôt que la mère ou les gosses ? Mystère. Pourquoi pas après tout, d’ailleurs un film colombien (La Bonne) s’en était déjà mieux sorti. Sauf qu’on n’y était pas totalement : le récit s’attache un peu plus à elle, mais pas suffisamment encore pour en faire un personnage central (Cuarón surtout peine à sympathiser avec elle après la perte de son enfant : peut-être y cherche-t-il à ce moment, en s’attardant sur elle, comme d’habitude, à nous faire entrer en empathie avec elle, mais puisque personne dans la famille ne se soucie de son sort, en dehors de quelques gestes sympathiques de la mère sans pour autant que cela démontre une empathie folle pour sa bonne, pourquoi devrions-nous être touchés par son sort ?).

Bref, on est dans le flou : on ignore de qui l’histoire nous est racontée, et on ne saisit pas plus ce qu’on voudrait bien nous montrer. C’est que quand on multiplie les plans longs où il ne se passe pas grand-chose (une marque de fabrique chez Cuarón, qui tend certes parfois à l’exploit, comme ici la séquence de la baignade, mais qui raconte peu de choses au final et on sent trop la volonté de réaliser un exploit), on manque de temps pour placer du sens dans son film. 0 + 0 + 0 événement marquant, ça donne toujours au final 0. Cuarón se servirait de ces plans séquences pour créer de la tension en suggérant l’imminence d’un drame ou pour mettre le doigt sur une séquence cruciale dans son récit, ç’aurait non seulement plus de sens pour guider notre intérêt, mais ça leur donnerait une légitimité formelle au sein d’une logique narrative. Là, non.

Alors oui…, jolie madeleine noyée dans la térébenthine… Des bonnes intentions de départ du réalisateur à honorer peut-être certains personnages de son passé, il ne reste rien dilué derrière le vernis de son formalisme stérile.


 


 

 

 

 

 

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L’Étreinte du serpent, Ciro Guerra (2015)

L’Étreinte du serpent

El abrazo de la serpiente Année : 2015

6/10 IMDb

Réalisation :

Ciro Guerra


Vu le : 3 décembre 2017

Pas sans rappeler l’esthétisant et creux Tabou. Il y a une forme de sacrilège à vouloir proposer des images d’Amazonie en noir et blanc, surtout avec un thème comme ça. Qu’est-ce que fait le noir et blanc sinon dénaturer les couleurs de la jungle ? Un choix esthétique qui sert, comme bien trop souvent, à combler le manque de maîtrise d’un cinéaste.

La direction d’acteurs est plutôt bonne, le scénario ça peut encore aller, mais la mise en image manque de poésie, de lyrisme. Boorman, Herzog, Coppola, en voilà des cinéastes qui savaient mettre en scène la forêt. Ici c’était comme si le cinéaste ignorait ce qu’il était en train de filmer, et qu’il se foutait de ce que ça représentait. Un comble quand on monte un tel sujet.

Qu’on ne me dise pas que le film est beau. Non, c’est vide. Le néant c’est tout sauf beau.


L’Étreinte du serpent, Ciro Guerra 2015 El abrazo de la serpiente | Buffalo Films, Buffalo Producciones, Caracol Televisión


L’eau était si claire, Yoichi Takabayashi (1973)

L’eau était si claire

Gaki zoshi

Année : 1973

Réalisation :

Yoichi Takabayashi

2/10 IMDb

Cette saloperie valait bien Le Trésor des îles chiennes. La même prétention pour cacher le vide : faire un film en noir et blanc, tout de suite, on gagne en crédibilité. Mais cette horreur nippone sortie d’on ne sait où (ça devait être une vieille copie de la Semaine de la critique…) ajoute au supplice visuel, une bande sonore vide, comme en écho à la trame narrative. Pas un bruit, pas une parole, pas une musique. Et il ne se passe rien. L’heure tourne comme dans un film de Chantal Akerman, mais comme Yoichi n’est pas une femme, on a moins de scrupules à dire qu’il n’a pas de talent.

Qu’est-ce qu’être réactionnaire dans le cinéma ? Faire un film à la fois muet et en noir et blanc. On flirte même avec le pinku quand un moine éjacule sur la tête d’une statue représentant Bouddha, et une fillette violée qui tombe amoureuse de son agresseur.

Même Wakamatsu a plus de talent, au moins il ne ment pas sur la marchandise.

Yôichi Takabayashi réalisera quelques années plus tard, La Femme tatouée (curiosité pinkuesque passée il y a bien longtemps me semble-t-il sur Arte).


Le Trésor des îles chiennes, F.J. Ossang (1990)

On a mangé les champignons de L’Île mystérieuse (Tintin)

Le Trésor des îles chiennesAnnée : 1990

Réalisation :

F.J. Ossang

2/10  

Si Luc Besson a monopolisé 10 % de son cerveau pour écrire, dialoguer et mettre en scène Le Dernier Combat est-ce possible que FJ Ossang en ait utilisé encore moins pour imaginer cette chose ?

Autrement, magnifique photo (voir plus bas), tout le reste est risible, abscons, pathétique. Un peu comme un Raoul Ruiz du pauvre (et j’aime pas Raoul, souvent, mais à y penser à côté, il y a comme un grand écart). Amoureux de la tradition dramaturgique insulaire et montagnarde s’abstenir.

Au-delà du scénario et surtout des dialogues d’une prétention affligeante, il y a ce que j’ai vu de pire (je suis gâté en ce moment) en matière de jeu d’acteurs. La caricature des mauvais acteurs de théâtre déblatérant un texte qu’ils ne comprennent pas (et pour cause, ça ne veut rien dire). Mais que ces acteurs-là réussissent à se faire une place dans le métier et à empoisonner le public qui finit par ne plus voir de sa vie de spectateur un bon acteur, ça restait quand même assez rare de voir ces éclats de voix et ses intonations chantantes au cinéma.

Ce n’est pas si mal parfois de voir de grosses merdes. Là par exemple, ça me permet d’un peu plus apprécier Raoul Ruiz. Parfois, tu flaires quand même ce qui cloche tellement c’est évident ; et d’autres fois tu te demandes : « Mais OK, faudrait faire quoi là ? » Et en fait, tu es tellement démuni face au vide de l’histoire ou de la bêtise des situations qu’il n’y aurait aucun moyen de rendre ça moins stupide. C’est vérolé comme jamais à la base, et ça, en dehors de certains courts-métrages, c’est assez rare dans des longs.

Il y a des tonnes d’histoires libres de droit, j’ai vu l’autre jour un Dickens fantastique réalisé par la télévision britannique (ces acteurs…, ça change), bah, le matériel est tout chaud, il n’y a plus qu’à. Ici, non seulement l’histoire ne veut rien dire et est mal construite, mais en plus la réalisation est consternante : pas de découpage technique ou quand il y en a ça te fait un montage chiant sur des non-actions, un sens du récit et du rythme nul (mais on voit en gros ce qu’il essaie de faire, on a tous plus ou moins essayé avec le même succès avec un caméscope sauf que là c’est Darius Kondji) et donc des acteurs comme on en voit là encore que dans des courts (et les pires).

On rigole au moins. Il faut imaginer Stalker réalisé par Alain Berbérian avec Brun Solo et Clovis Corniac. (Le Corniac y est déjà d’ailleurs.)

(Extrait passé en « privé ») Petit avant-goût avec ce qui ne peut être qu’un hommage subliminal au chef-d’œuvre d’Enki Bilal, Bunker Palace Hotel :

(Ce qui suit vaut aussi le coup d’œil, c’est la version jeanmariestraubienne de la scène du conduit à ordure dans la Guerre des étoiles.)


Images de la vidéo promotionnelle du film :

Le Trésor des îles chiennes, F.J. Ossang 1990 | Filmargem, Gemini Films, Instituto Português de Cinema (IPC)


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Heimat – L’exode, Edgar Reitz (2013)

Échec, Heimat

Note : 2.5 sur 5.

Heimat – L’exode

Année : 2013

Réalisation : Edgar Reitz

Le passage de la télévision au cinéma et à un format plus condensé passe mal. Pour faire cinéma, on utilise une photo absolument immonde (c’est quoi ? un noir et blanc torché en numérique ?!) et un format suppositoire pour nous le mettre bien profond. Sauf que rien fait cinéma, et même si on considère, que c’est tourné pour la télévision, toutes ces ambitions de grandeur et ces moyens cachent mal ce qui reste à Reitz pour être un véritable cinéaste. Parmi les qualités du cinéma, du bon, et ce n’est pas seulement une qualité propre au 7ᵉ art, on trouve l’exigence de la concision, l’évidence du ton juste, du rythme idéal ou la maîtrise dramaturgique (objectifs, équilibre des proportions, procédés narratifs…). Or, Reitz maîtrise rien de tout ça.

L’un des problèmes majeurs du film, c’est que Reitz hésite en permanence entre chronique et trame plus classique avec un objectif parfaitement défini. La série était une chronique, plutôt bien menée et, à mon sens, il n’y avait guère que l’utilisation du personnage de Paul qui faisait un peu tache. L’ironie, c’est bien que si Paul avait émigré à la fin du premier épisode (introduisant donc une sorte de mystère dont on se fout, heureusement, pas mal le reste de la série), on retrouve exactement la même thématique ici, et le problème, c’est bien qu’elle prenne un peu trop de place dans le film. Ou pas assez. C’est trop, si on est dans la chronique, et pas assez, si on veut condenser tout ça autour d’un sujet principal ou unique. Si Reitz ne sait même pas où il va, ça paraît compliqué d’accepter de le suivre. Du coup, on se demande bien pourquoi faire un film aussi long, ou pourquoi ne pas en avoir fait quelque chose pour la télévision.

Et oui, tout est toujours question de choix. Si par exemple, le récit se focalisait sur un thème principal, il aurait mieux valu achever le premier acte avec la décision du frangin de partir pour le Brésil, alors même que c’est Jakob qui nous vendait du rêve depuis le début. À l’image de la fin du premier épisode de la série, on termine une introduction sur une « catastrophe » pour le personnage principal : départ manqué, essaie encore. On peut alors dans le développement, créer une relation conflictuelle entre les frangins. Là, Jakob voit sa copine se faire niquer par son frérot (étrange hasard : on bourre la gueule des personnages et on regarde ce qui se passe, sorte de Bacchus ex machina), donc Jakob joue les rebelles et finit en taule… Le lien aurait pu être fait avec le Brésil, comme une entrave à ses jolis espoirs, sauf qu’à ce moment, Reitz préfère traiter les événements sous la forme de la chronique, avec distance, sans faire le lien forcément avec la quête émigrationiste, si bien que les enjeux, bah, on s’en moque un peu, d’autant plus qu’on passe rapidement d’un personnage à un autre (on est toujours dans la chronique). Pour s’attacher, comprendre, à un objectif, il faut pouvoir s’identifier à un personnage, ne jamais perdre de vue ses désirs, ses contrariétés, et la chronique ne permet pas du tout ça, ou sur le long terme, avec le format de la série…

L’autre aspect qui m’a perso bien agacé, c’est le son. On pourrait presque entendre les acteurs péter. Foutez des micros « high deafinition » partout et ça fera joli… Eh ben non. Pouvoir entendre tout en gros plan n’a aucun intérêt. Pire, pour mes petites oreilles sensibles, c’est foutrement pénible. Les fréquences basses ont tendance à me déclencher des micro-angoisses, j’ai les yeux qui sortent de leur orbite et je cherche le coupable, j’ai la sueur qui s’invite en bas de l’échine, et on viendrait poser un micro tout près de mon cul qu’on l’entendrait certainement lui aussi raconter sa vie. Les bruits de sabots sur les planches du parquet, le tonnerre, et cette saloperie de musique, ça ne passe pas. Comme l’impression d’être dérangé dans ma tombe par des vilaines bêtes nécrophages. Que cela se sache, mon cercueil, je le veux isolé avec de la laine de verre, tapissé, moquetté, baigné dans la ouate naphtalinée. Mort, enterré, et sourd.


Heimat – L’exode, Edgar Reitz 2013 | Edgar Reitz Film (ERF), Les Films du Losange, ARD Degeto Film 


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Tabou, Miguel Gomes (2012)

Tarzan et Jane en peau de croco, ou le film des parties en vrille

Tabou

Note : 3 sur 5.

Titre original : Tabu

Année : 2012

Réalisation : Miguel Gomes

Avec : Isabel Cardoso, Laura Soveral, Telmo Churro, Miguel Gomes

Un film estampillé “Cahier”. Comme c’est étonnant.

Quand on prend des mannequins à la place de vrais acteurs, quand on chie une image toute caca, quand on pallie le vide sidéral d’une histoire sans intérêt et le manque d’unité affolant du film par une couche de titres et de sous-titres pour prétendre à une structure grossière, il y a tout à parier qu’on est en face d’un film qui se la raconte plus qu’il ne nous raconte.

Formellement, c’est excessivement grossier et impersonnel. Au-delà de toutes ces prétentions formelles et superficielles que reste-t-il au film ? Rien. Comme un film brouillon sans queue ni tête, sans intention, sans direction et sans rigueur. Un film, ça s’écrit avant que ça ne se réalise. On commence à s’interroger sur la couleur des meubles, les références, le style joli à donner à ses compositions, avant de chercher à raconter une histoire avec un début, un milieu et une fin.

Parce que pour s’émouvoir d’autant de prétentions molles et d’un savoir-faire plus que suspect, c’est s’attacher un peu facilement à vouloir y reconnaître des hommages à un cinéma vaguement lointain et qui parce que lointain, parce qu’en noir et blanc, parce que muet, aurait forcément une valeur supérieure à ce qui se fait aujourd’hui. Les intentions, au moins, formelles, seraient louables avec un propos cohérent, mais on ne juge pas les intentions, ou les prétentions de mise en scène, avant celles du sujet qui, ici, n’existent pas. Il y a même à parier que si on est aussi prompt à vanter l’intention de se rapporter à ce cinéma disparu, c’est qu’on s’y connaît soi-même assez peu, mais qu’on y adhère parce que, merde, les vieux films en noir et blanc, muet, ça peut n’être que trop cool. À l’image de The Artist. Les bonnes intentions, ce n’est pas le talent. Et du talent, il en manque furieusement ici. Donc, pour un jeune cinéaste, c’est bon à savoir : la rigueur et le savoir-faire sont accessoires ; honore les anciens, et comme on ne crache pas sur les vieux (qui puent), tout le monde se précipitera pour t’applaudir. Tout est question de posture. Un peu à la « Indignez-vous ! » dans un autre registre. Mais oui bordel, les jeunes, indignez-vous, révoltez-vous ! « Hein ? contre quoi ? Bah… » Donc honore les vieilleries, jeune cinéaste, on y gagne toujours. Les bonnes intentions ne font pas de films. Mais elles donnent du grain à moudre à la presse. Leur offrir un angle tout trouvé sur un plateau, vous pensez bien qu’elle adore ça et vous le rendra bien. C’est la grande différence entre un mauvais film sur quoi on aurait pas mal de (bonnes) choses à dire ; et des bons films qu’on est incapable de défendre.

Tabou, Miguel Gomes 2012 Tabu RTP, O Som e a Fúria, Komplizen Film, Gullan,e Ibermedia, ZDF Arte (4)_

Tabou, Miguel Gomes 2012 Tabu | RTP, O Som e a Fúria, Komplizen Film, Gullane, Ibermedia, ZDF/Arte

Tabou, Miguel Gomes 2012 Tabu RTP, O Som e a Fúria, Komplizen Film, Gullan,e Ibermedia, ZDF Arte (5)_

Les personnages ont l’épaisseur d’une feuille de papier toilette ; et on abandonne ceux développés au début du récit donnant au film une sévère impression d’improvisation. Certaines scènes au début du film sont ce que j’ai pu voir de pire en matière de direction d’acteurs ; et je ne sais pas quoi penser au fait que se sachant piètre directeur, Michel Gomes fasse tout d’un coup le choix, comme ça sans raison, de limiter justement le jeu des acteurs dans toute sa seconde partie en flashback (déjà une horreur dramatique en soi) en les rendant muets… Ma foi, si tu es si piètre directeur d’acteurs mon bon Michel, ça aurait été plus cohérent de focaliser ton film sur la seconde partie. Seulement, il est probable qu’à l’écriture, te rendant compte de la faiblesse du sujet, que tu te sois évertué à l’améliorer en lui adjoignant une imposante et inutile introduction. Et puisque trop imposante…, tu maquilles le monstre en scindant artificiellement le film en deux. « Si, si, amigo, je t’assoure, c’était prévou ! » L’errance structurelle du récit, cherchant sur le tard à se trouver une cohérence, ça me laisse sur le cou… Quand le sujet de départ est bidon, il n’y a rien à améliorer. On ne fait pas de clafoutis avec de la boue et quelques trognons de pommes. Et ce n’est pas en s’interrogeant sur la disposition ou la température de cuisson qu’on y changera quelque chose.

Que dire ensuite de la photographie… À l’image des deux protagonistes de la seconde partie : trop beaux pour être crédibles. On sent trop la volonté de faire “esthétique”. Seul compte, toujours, la forme, la prétention. Et au final, la tonalité générale du film donne l’impression de voir la vie depuis l’intérieur d’un sac-poubelle. Contraste me direz-vous entre la laideur de l’image et la beauté des acteurs… Heu oui, d’accord, c’est comme déposer un gros caca place de la Concorde, y planter une belle marguerite, et dire : « voilà, le contraste saisissant du monde ; tout est résumé en une image ». Woah… hé, mais, hé, chères amibes, l’art, ce n’est pas le ton juste, la proportion juste ?

Reste une qualité au film. Rayon « équipe technique ». Sa capacité à passer rapidement d’une scène à une autre, d’une époque à une autre. Paradoxalement, c’est plus réussi dans la première partie avec une certaine réussite dans l’usage des ellipses. Seulement, là encore, on se rend très vite compte du manque de cohérence, et que ça ne nous mène nulle part — difficile dans ces conditions de pouvoir accepter de laisser son imagination jouer son rôle. Quant à la seconde partie, il n’y a pas à se fouler puisque tout est monté autour d’une pénible voix off. Les images ne font qu’illustrer, et n’apportent pas grand-chose de plus à une histoire déjà profondément insipide. Mais oui, le côté image publicitaire marche très bien. Foutre un crocodile dans son film, ça ne sert pas à grand-chose, mais ça fait cool. L’Afrique sauvage domestiquée quoi, l’aventure ! La supériorité de l’homme (blanc) sur la nature ! Oué… trop profond. Ah, et pis tiens, ça fera une jolie affiche de film. Qui résume très bien à elle seule le sujet. Nada.

Faut éviter d’écrire des scénarios bourrés, Michel. Tu t’es vu quand Tabou ?… (Ah, tiens, je me disais bien qu’elle devait avoir été déjà faite… Quel Artist.)


 


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Sátántangó, Béla Tarr (1994)

Mon petit poney

Le Tango de Satan

Satan's Tango

Note : 2.5 sur 5.

Titre original : Sátántangó 

Année : 1994

Réalisation : Béla Tarr

Avec : Mihály Vig, Putyi Horváth, László Lugossy

Quelques précisions. Jusqu’à présent concernant Tarr, je n’ai jamais entendu dire que techniquement c’était formidable, sans se donner la peine d’expliquer précisément en quoi ça l’était. La réponse est simple : ça ne l’est pas. Dans la fameuse scène des astres dans Les Harmonies Werkmeister ce qu’il fait tourner, ce sont ses prétentions. Ses admirateurs auront vite fait de se joindre à lui. Tarr, c’est un grand vide spatial et une magnifique escroquerie. Je lui reconnais au moins ce talent.

Les plans-séquences hautement revendiqués, et remarqués, comme tels, n’ont jamais rien exprimé d’autre que la haute suffisance des cinéastes qui les mettaient en scène. C’est, au théâtre, comme utiliser des acteurs nus sans justification. (Ah, d’ailleurs…) Cette justification doit se faire à l’intérieur même de l’œuvre et doit apparaître comme une évidence, et pour cela il faut que tous les éléments du récit suivent la même cohérence. S’il faut pour trouver une justification à ces prétentions chorégraphiques, feuilleter des bouquins, des interviews, ou plancher sur des thèses, ce n’est plus du cinéma, mais une sorte de cour autosuffisante qui se nourrit et produit pour elle-même. C’est ce qu’il y a de pire dans l’art. Des escrocs, et des opportunistes qui légitiment leur escroquerie en leur donnant un sens qu’ils n’ont jamais donné. Tarr peut parler à quelques-uns, c’est certain, il y a une volonté, ou une ambition, poétique, je ne le nie pas. Ce n’est pas pour autant qu’il faille y voir des prouesses techniques ou un intérêt fou. C’est du niveau de Gaspar Noé, tout en étant à l’opposé de ce que l’autre propose. Ce sont avant tout des recherches esthétiques. Et un artiste qui continue de chercher au lieu « d’avoir trouvé » pour moi reste et restera mineur. La justification a posteriori du génie, c’est de l’escroquerie. On n’est pas chez Darty : on paie pour voir quelque chose, on n’a pas à acheter en plus une brochure pour comprendre ce qu’on vient de voir. L’explication dans l’art, ce n’est pas de l’art. Si tu ne convaincs pas « pendant », rien ne te donne le droit de convaincre « après », encore moins si tu laisses les autres convaincre à ta place.

Qu’on me dise que le plan-séquence, c’est un élément de son langage cinéma…, pour moi, ça ne veut strictement rien dire, c’est du vent. On pourrait dire ça pour tout et pour rien. Suffisamment vague pour qu’on puisse y croire ou y adhérer. Eh ben, non, quitte à avoir des explications qui concernent ceux qui y trouvent un intérêt, autant que ça se fasse clairement. Le sens profond de ces hautes volées scéniques, c’est si compliqué à exprimer ? C’est impossible à relayer sommairement ? Non, il faut feuilleter un bouquin… Autant dire « nul n’est censé ignorer le talent de Bela Tarr, il est là, à qui sait… s’informer »… Le talent, il est dans ses films, ou il ne l’est pas.

Je connais parfaitement les escrocs pour les avoir suffisamment fréquentés et savoir comment ils fonctionnent. Qu’on me dise qu’il y a quelque chose qui m’échappe, c’est bien parce qu’il n’y a rien à comprendre. À part que c’est une escroquerie. Le talent d’escroc de Tarr, c’est au moins de proposer toujours la même. Qu’on me dise que Tarr se fout de l’histoire ? Qu’il cesse donc de faire des films narratifs qui pourraient laisser le contraire et fasse du cinéma explicitement non narratif. Dans le cinéma narratif, le message, s’il y en a un, en plus d’être au mieux à peine suggéré au spectateur, il se fait à travers la fable, donc l’histoire ; la mise en scène se met au service de tout ça. Le cinéma non narratif propose autre chose. Si c’est ça qu’il veut faire, qu’il le fasse. S’il ne le fait pas c’est qu’il entretient encore l’idée que ses films puissent se reposer sur l’histoire. Je doute d’ailleurs fort que lui-même et une partie de ses aficionados affirment que tout l’intérêt de ses films ne réside que dans sa mise en scène et que ces histoires ne sont que des prétextes. Certains y voient ce que lui n’aurait jamais pensé y mettre, et on lui donne des intentions qui ne sont sans doute pas les siennes ; mais ça, c’est le lot de tous les artistes, qu’ils soient talentueux ou non. Voir interpréter son travail, bien sûr que ça l’arrange, parce qu’au niveau purement technique, c’est du vide sidéral, et si on le comparait à d’autres cinéastes expérimentaux, non narratifs, ça ne pèserait pas bien lourd : des plans-séquences (dont le cinéma non narratif s’est d’ailleurs le plus souvent bien royalement foutu, et pour cause), du steadicam, un noir et blanc poisseux, et du vent d’automne balayant les routes… Oui, énorme. Faut vraiment que derrière le SAV soit bien rôdé parce que même le pire des escrocs aurait du mal à convaincre qu’il y ait quelque chose à voir. Son talent, donc, et je ne le nie pas à ce niveau, il est bien là.

Changer d’avis sur le bonhomme, ça arrive aussi parfois. Je peux le faire avec le Faust de Sokourov par exemple. Mais cette capacité-là à retourner sa veste, c’est plus le talent du spectateur que celui de l’auteur. Chacun a le droit d’être escroc à son tour… Or, c’est toujours un peu pratique de prétendre que ceux qui ne s’émerveillent pas d’un prétendu génie le détestent comme s’ils y voyaient en réalité quelque chose qui les gênait et qu’ils refusaient de voir. Non, Tarr, est pour moi, juste moyen. Je ne désespère pas, je regarde, j’espère. Le spectateur peut à tout moment changer d’idée, et même revoir ce qui l’a laissé indifférent à la lumière de ce qu’il a « expérimenté » depuis. Mais ça, si ce n’est le spectateur, c’est surtout dû à un phénomène dont Tarr peut être, à la longue, bénéficiaire, comme beaucoup d’autres : l’accoutumance. Regarder dix minutes un type assis à une table, ça peut ne pas être bien passionnant. Regarder le même type, dix minutes, à la même table, tous les jours, et on peut en redemander. Parce que l’histoire, elle est aussi dans ce qu’on se raconte. Et apparemment, il faut se la raconter beaucoup pour apprécier Tarr, mais je ne me laisserai pas si facilement embobiner. Il faut me mériter, parce que je suis spectateur, et que le spectateur se doit d’être le plus intransigeant possible quand le courant ne passe pas. Ce n’est jamais à lui de faire l’effort. Parce que l’effort, il l’a déjà fait : en regardant le film. Lui demander en plus de venir s’asseoir tous les jours à la même heure pour voir Tarr ou un autre raconter des histoires qu’on serait en plus censés inventer à sa place, ce serait pour moi pousser un peu le bouchon. J’adore les escrocs, comme les magiciens, mais je préfère qu’on me « fasse marcher », pas que j’ai moi à faire l’effort de marcher pour comprendre ce que monsieur l’artiste a bien voulu dire. Des artistes, ça court les rues, ils ont tous quelque chose à dire. Si on doit tendre l’oreille pour les petits rois, on ne s’occupe plus des artistes « du bas » qui n’ont pas la carte et qui eux font l’effort de respecter le jeu : c’est eux qui doivent nous faire marcher, pas le contraire.

(Ma caissière est Hongroise, il va bien falloir que je la fasse marcher aussi si je veux l’emballer. Je lui parlerais peut-être un jour du Cheval de Turin avec des étoiles dans les yeux comme si c’était mon petit poney…)


Sátántangó, Béla Tarr 1994 Le Tango de Satan | Mozgókép Innovációs Társulás és Alapítvány, Von Vietinghoff Filmproduktion (VVF), Vega Film, TSR

 


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