
La Clé de verre

Titre original : The Glass Key
Année : 1942
Réalisation : Stuart Heisler
Avec : Alan Ladd, Veronica Lake, Brian Donlevy
Que du beau monde ! Alan Ladd, Veronica Lake et tous les meilleurs seconds rôles de l’époque. Un pur film noir. Alan Ladd en parfait antihéros, limite masochiste, aimant se faire casser la gueule (on dirait Nicholson dans Chinatown). Une garce, un mafioso romantique, et une histoire incompréhensible. Il n’y a rien à y faire, les Hammett et les Chandler, je n’y comprendrais jamais rien, et c’est tant mieux. Une bonne histoire, c’est une histoire qui fait semblant et qui arrive à nous faire oublier qu’on regarde un film. Et là, une seule règle, la bienséance, pas de celle qui choque, mais de celle qui quand on en manque nous laisse sur le quai.
L’intrigue vaut que dalle, mais il faut faire comme si et se débrouiller pour éviter les incohérences ou les facilités qui peuvent même troubler les spectateurs appliqués à regarder autre chose. Un bon film, c’est comme un bon papier peint : ça doit faire joli, ça doit présenter une unité, créer une ambiance, mais surtout, ça doit s’effacer derrière la pièce pour mettre en valeur l’essentiel : la cohérence d’ensemble. Rien ne doit attirer le regard, ce n’est plus un papier peint, on doit se sentir comme chez soi. Et même la Veronica, elle pourrait passer chez le coiffeur qu’on n’y prêterait plus attention. Si ça colle à l’esprit. C’est tout un art, la transparence. Arriver à pondre des intrigues qui donnent à voir, avec le bon nombre de scènes à faire, avec la bonne partition et le nombre de personnages qui s’affrontent dans une même pièce. Le reste, c’est du polissage. Les intrigues se valent toutes. Ce qui compte, c’est de savoir si les motifs, les couleurs, si tout ça est accordé.

La Clé de verre, The Glass Key, Stuart Heisler 1942 | Paramount Pictures
La mise en scène laisse parfois un peu à désirer, pas forcément à cause du cinéaste (totalement inconnu) mais peut-être aussi parce que c’est l’époque qui veut ça, ou le genre. Et ce n’est pas non plus du Howard Hughes aux commandes. Un bon petit film de série B en somme.
C’est étrange, je n’aimais pas beaucoup Alan Ladd avant ça… Je m’y fais, il a sacrément la classe. Le genre de personnages qui reste quoi qu’il arrive imperméable à ce qui se passe autour de lui, limite insolent dans sa désinvolture et dans ses piques — les beaux types ne sont jamais meilleurs que quand ils ne sourient pas… ils passent pour des bellâtres sinon. (Quoique…, pour moi, pas plus grand que Ladd, acteur beau comme un bœuf, ça n’a jamais rien changé à ma carrière.)