Les Indispensables du cinéma 1938

Les Indispensables du cinéma 1938

Introduction, principes et index

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Les 5 films de l’année 1938 :
  1. L’Impossible Monsieur Bébé, Howard Hawks
  2. Les Aventures de Robin des Bois, Michael Curtiz
  3. Une femme disparaît, Alfred Hitchcock
  4. Les Anges aux figures sales, Michael Curtiz
  5. Le Quai des brumes, Marcel Carné

Au programme :

Après le succès de Pension d’artistes, la RKO tente de suivre le filon de la comédie avec Katharine Hepburn. Le changement de registre est une réussite, et sous la direction d’Howard Hawks (qui lui aussi étoffe son rayon d’action vers la comédie), l’actrice fait la paire une première fois en cette année 1938 avec Cary Grant dans l’une des screwball comedies les plus abouties d’avant-guerre et un des meilleurs exemples de « comédie de remariage » (sous-genre auquel Cary Grant est et sera souvent affilié) : L’Impossible Monsieur Bébé. Le duo d’acteurs retrouve George Cukor (qui les avait dirigés sur Sylvia Scarlett en 1935) dans une romance plus classique et cette fois pour la Columbia : Vacances. Autre actrice de Pension d’artistes, Ginger Rogers impose James Stewart comme partenaire sur Mariage incognito, une comédie romantique réalisée par George Stevens. L’actrice fait par ailleurs toujours la paire avec Fred Astaire dans un type de film qui a fait le succès du studio, toujours devant la caméra de Mark Sandrich : Amanda.

À la Warner, on capitalise encore et encore sur le trio Curtiz-de Havilland-Flynn, cette fois en adaptant Les Aventures de Robin des Bois en couleurs. Le film est récompensé par trois Oscars. Dans un style plus commun au studio, Michael Curtiz dirige cette fois James Cagney, Humphrey Bogart et la bande des Dead End Kids dans Les Anges aux figures sales. L’omniprésence du réalisateur d’origine hongroise se vérifie, car aux Oscars, il sera nominé pour deux films dans la section réalisation : Les Anges aux figures sales et… Rêves de jeunesse, qui réunit en têtes d’affiche Claude Rains et pour la première fois à l’écran John Garfield (l’année suivante, le premier chassera l’autre, réfugié auprès des Dead End Kids, dans Je suis un criminel). William Wyler délaisse quelque temps sa collaboration avec le producteur Samuel Goldwyn pour en commencer une autre avec Bette Davis : l’actrice recevra un second Oscar pour sa prestation dans L’Insoumise (Henry Fonda lui donne la réplique, et le fils de Walter Huston, John, participe à l’écriture du scénario). Après Les Aventures de Robin des Bois qui est le grand succès de l’année, et parallèlement à ses films avec Olivia de Havilland, Errol Flynn tourne La Patrouille de l’aube, un film sur la Première Guerre mondiale, sous la direction d’Edmund Goulding.

À la Columbia, Frank Capra et son scénariste Robert Riskin ont le bon goût d’adapter la nouvelle pièce à succès de l’auteur de Pension d’artistes, George S. Kaufman, écrite cette fois en collaboration avec Moss Hart : Vous ne l’emporterez pas avec vous réunit Jean Arthur, James Stewart et Lionel Barrymore à l’écran (devant la caméra de Capra, la première s’était déjà révélée dans L’Extravagant Mr. Deeds, et elle fera à nouveau la paire avec James Stewart sur Mr. Smith au sénat l’année suivante, qui de son côté retrouvera Lionel Barrymore après la guerre dans La vie est belle). Le film remportera la statuette du meilleur film, et Frank Capra sera récompensé de l’Oscar du meilleur réalisateur. Découvreur de talents reconnu, le travail de Capra aura été notamment d’imposer James Stewart sur le film ce qui fera de l’acteur une star du grand écran après des années à la MGM où il était limité à des seconds rôles et était prêté à d’autres studios (notamment à la RKO — et à Ginger Rogers — sur Mariage incognito).

À la MGM, Spencer Tracy porte le col romain dans Des hommes sont nés et reçoit son second Oscar d’affilée. Après Le destin se joue la nuit, Frank Borzage renoue avec le mélodrame en faisant adapter Les Trois Camarades d’Erich Maria Remarque (À l’Ouest rien de nouveau) par F. Scott Fitzgerald : trois “camarades” de la Première Guerre mondiale (côté allemand) sont amoureux de la même femme interprétée par Margaret Sullavan (les camarades sont Robert Taylor, Franchot Tone et Robert Young). King Vidor dirige Robert Donat et Rosalind Russell (accompagnés de Rex Harrison et de Ralph Richardson) dans La Citadelle. Enfin, le studio adapte A Christmas Carol de Charles Dickens avec Reginald Owen dans le rôle de Scrooge.

À la Paramount, Ernst Lubitsch met en scène La Huitième Femme de Barbe-Bleue d’après une pièce française qui marque surtout les débuts de la collaboration au scénario entre Billy Wilder et Charles Brackett. Le film oppose Claudette Colbert et Gary Cooper. Sylvia Sidney fait la leçon à des malfrats dans Casier judiciaire en leur expliquant que le crime ne paie pas ; le film est réalisé une nouvelle fois par Fritz Lang, et George Raft donne la réplique à l’actrice.

À la Twentieth Century Fox, le vétéran Henry King réalise deux films avec la même équipe : Tyrone Power, Alice Faye et Don Ameche apparaissent dans L’Incendie de Chicago et La Folle Parade (le scénariste Lamar Trotti est à l’adaptation et occupera souvent cette fonction dans les films avec Tyrone Power souvent réalisés par Henry King). Les deux films sont nominés aux Oscars du meilleur film : l’un, sorti en début d’année, pour la cérémonie de 1938, l’autre, sorti en fin de seconde partie de l’année, pour celle de 1939.

Toujours en marge des majors, Walter Wanger lance Casbah, le remake de Pépé le Moko : Charles Boyer récupère le rôle tenu par Gabin dans le film initial, et face à lui, on retrouve Hedwig Kiesler, l’actrice du sulfureux Extase, qui en arrivant à Hollywood prend le nom d’Hedy Lamarr (c’est la deuxième nomination de Boyer aux Oscars ; et pour la seconde fois d’affilée, c’est Spencer Tracy qui remporte la statuette).

Chez Disney, les aventures de Mickey continuent d’émerveiller les grands comme les petits avec La Remorque de Mickey et Le Brave Petit Tailleur.

Au rayon burlesque, le Laurel & Hardy de l’année s’intitule Têtes de pioche.

Le style documentaire s’affine dans les années 30 avec notamment une série de moyens métrages réalisés par Pare Lorentz, ici avec The River, un documentaire illustrant l’importance du Mississippi dans l’agriculture américaine.

En France, Jean Gabin est toujours de tous les fronts (populaires) : confronté d’abord à la belle Michèle Morgan devant la caméra de Marcel Carné dans Le Quai des brumes, puis à la Bête humaine de Jean Renoir. Marcel Carné réalise également Hôtel du Nord, adapté au cinéma par Henri Jeanson et Jean Aurenche, on y retrouve Arletty, Louis Jouvet, Jean-Pierre Aumont et Annabella. Les trois films sont des exemples de « réalisme poétique », mouvement cinématographique français qui marque l’avant-guerre. Présent dans Le Quai des brumes, Michel Simon fait la leçon aux Disparus de Saint-Agil en compagnie d’Erich von Stroheim (le film est réalisé par Christian-Jaque). Gabin, Jouvet, Michel Simon, il ne manquait que Raimu à cette année 1938 : il retrouve Marcel Pagnol, qui adapte un autre auteur du Sud, Jean Giono, avec La Femme du boulanger. Pagnol signe la même année un nouveau film avec Fernandel après Regain notamment : Le Schpountz (l’actrice d’Angèle et la Fanny de la trilogie marseillaise, Orane Demazis, est également de la partie). En plus de La Bête humaine, Jean Renoir réalise en partie grâce à la CGT, un film sur la Révolution française : La Marseillaise. Enfin, en voyant venir le risque d’une nouvelle guerre avec l’Allemagne, Abel Gance réalise un faux remake de son J’accuse de 1919, un film qui illustre bien sans doute la volonté en France d’éviter une guerre devenue inévitable.

En Angleterre, Alfred Hitchcock réalise Une femme disparaît qui marque les débuts à l’écran de Michael Redgrave. Leslie Howard revient sur l’île pour interpréter le professeur Higgins dans l’adaptation de la pièce de George Bernard Shaw à l’écran par Anthony Asquith : Pygmalion.

En Union soviétique, Marc Donskoï rend hommage à l’auteur des Bas-Fonds et de La Mère décédé en 1936 avec L’Enfance de Maxime Gorki. Deux ans après Le Cirque, au sein du studio Mosfilm, la vie est un long fleuve tranquille pour Grigori Aleksandrov : il réalise Volga Volga. De son côté, Sergueï Eisenstein, accompagné de Dmitri Vassiliev à la mise en scène et de Prokofiev à la musique, tourne un film capable d’exalter le patriotisme et de plaire à Staline qui joue à cache-cache avec les futurs envahisseurs nazis : Alexandre Nevski. Dans un même temps, chez le futur envahisseur, trois ans après avoir glorifié le pouvoir nazi dans Le Triomphe de la volonté, Leni Riefenstahl exalte cette fois la beauté des corps en mouvement dans Les Dieux du stade.

En Finlande, La Mort volée est réalisé par Nyrki Tapiovaara. Et en Suède, la Svensk Filmindustri produit Visage de femme, réalisé par Gustaf Molander ; deux ans après Intermezzo et peu de temps avant son départ pour Hollywood, Ingrid Bergman en est l’interprète.

Au Japon, Hiroshi Shimizu poursuit sur la voie des comédies mettant en scène des groupes éphémères partis en villégiature : Une femme et ses masseurs.


L’Impossible Monsieur Bébé, Howard Hawks 1938 | RKO 


*Indice de notoriété

L’Impossible Monsieur Bébé, Howard Hawks

2 138 448*

Les Aventures de Robin des Bois, Michael Curtiz

952 187

Une femme disparaît, Alfred Hitchcock

951 210

Les Anges aux figures sales, Michael Curtiz

211 878

Le Quai des brumes, Marcel Carné

157 080

Vous ne l’emporterez pas avec vous, Frank Capra

144 612

Vacances, George Cukor

143 374

Alexandre Nevski, Sergueï Eisenstein & Dmitri Vassiliev

121 500

La Bête humaine, Jean Renoir

104 400

Pygmalion, Anthony Asquith

97 188

L’Insoumise, William Wyler

81 104

Les Dieux du stade, Leni Riefenstahl

80 808

La Femme du boulanger, Marcel Pagnol

29 700

The River, Pare Lorentz

25 600

Hôtel du Nord, Marcel Carné

14 060

Le Brave Petit Tailleur, Burt Gillett & Bill Roberts

9 424

La Remorque de Mickey, Ben Sharpsteen

8 848

Mariage incognito, George Stevens

8 378

La Huitième Femme de Barbe-Bleue, Ernst Lubitsch

6 768

L’Enfance de Maxime Gorki, Marc Donskoï

6 480

La Patrouille de l’aube, Edmund Goulding

6 000

La Marseillaise, Jean Renoir

5 880

Des hommes sont nés, Norman Taurog

4 752

Amanda, Mark Sandrich

4 200

Têtes de pioche, John G. Blystone

3 600

Casier judiciaire, Fritz Lang

3 312

Trois Camarades, Frank Borzage

3 124

Une femme et ses masseurs, Hiroshi Shimizu

2 840

La Folle Parade, Henry King

2 760

Rêves de jeunesse, Michael Curtiz

2 622

L’Incendie de Chicago, Henry King

1 876

J’accuse !, Abel Gance

1 704

La Citadelle, King Vidor

1 278

La Mort volée, Nyrki Tapiovaara

1 224

A Christmas Carol, Edwin L. Marin

1 125

Visage de femme, Gustaf Molander

852

Volga Volga, Grigori Aleksandrov

660

Casbah, John Cromwell

602

Les Disparus de Saint-Agil, Christian-Jaque

657

Le Schpountz, Marcel Pagnol

296

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