Plus le point de vue de l’artiste est caché, meilleure est l’œuvre d’art.
Va t’amuser après à trouver légitime les assertions critiques prétendant retraduire l’intention de l’auteur.
Un peu plus tard, Tarkovski rappelle une constante, un classique dans la description des grandes œuvres :
Les grandes créations sont ambivalentes et autorisent les interprétations les plus diverses.
En rab, la citation de Tolstoï :
Le politique exclut l’artistique, car pour convaincre il a besoin d’être unilatéral !
En revanche, on pourrait dire que le « politique » constitue un formidable personnage de fiction. Parce qu’en tant qu’individu « excluant » l’art, et donc le doute, la multiplicité des points de vue, l’artifice, et au contraire cherchant l’efficacité du discours de l’instant sans tolérer, en apparence, la moindre inflexion dans son discours, il est un de ces monstres insaisissables, escrocs, subversifs, changeants, qu’affectionnent l’art. D’abord d’apparence inflexible au point de vue et aux idées franches, sur la longueur, l’inconsistance de son discours visant à convaincre ceux qui l’écoutent au moment où ils l’écoutent, tout ça pour ce personnage, forme une matière dramatique insaisissable, infinie, obscure, indescriptible, qui constitue un des meilleurs moteurs de la fiction.
Il n’y a que les monstres qui passent la rampe. Peut-être parce qu’on les craint et qu’on se demande toujours s’ils existent. Et qu’à force de les craindre, on finit par les voir partout. Comme le rêve, la fiction (ou l’art), nous place face à ce dont on a peur, presque pour le transcender, au moins par contradiction, en nous obligeant à réagir face à eux.