On était soi-disant en guerre contre le coronavirus. C’était en tout cas ce qu’avait prétendu Macron avant de déserter sur le fort de Brégançon. Si on prend au pied de la lettre ce qui avait été annoncé, voilà ce qu’aurait dû être fait depuis, disons, avril-mai, époque de ces déclarations solennelles au plus fort de l’épidémie en France (mais pas dans le monde), et voilà ce que ça aurait pu donner une gestion de la crise en mode « lutte totale contre le coronavirus » (et en fonction de diverses préconisations lues ici ou là en France ou à l’étranger) :
Phase 1 : dépistage, circonscription et éradication en France
_ Confinement des zones touchées par le virus. La circulation n’étant pas homogène, il est inutile de confiner des populations où le virus n’est pas présent. En revanche, interdiction pour les personnes de se déplacer en dehors d’une zone définie pouvant être la ville pour les zones denses. Il vaut mieux circonscrire que confiner à l’aveugle.
_Seuls les divers personnels de maintenance, ainsi que les métiers de la restauration (recyclés pour certains dans la livraison à domicile), des transports et de la santé sont autorisés à sortir de ces zones de circonscription. Dans la mesure du possible, les travailleurs sont accueillis dans des hôtels séparés de leur famille.
_ Fermeture des frontières internationales. Le seul vecteur de propagation du virus sur de grandes distances, c’est l’homme ; il faut donc réduire drastiquement les brassages de population. Mise à l’isolement pour quatorze jours pour les résidents de retour de l’étranger avec prise en charge obligatoire dans des hôtels dédiés.
_ Toute l’économie, toutes les capacités de production, sont orientées vers l’objectif de tester mieux, contenir en vue d’éradiquer le virus, et de subvenir aux besoins de premières nécessités de la population.
_ L’industrie est réquisitionnée, voire nationalisée, et tournée vers ces objectifs. Cela signifie que des secteurs d’activité entiers peuvent être réorientés pour satisfaire à l’objectif de lutte contre le virus. Au lieu d’aider une économie du « monde d’avant », on réoriente l’économie vers une demande urgente et principale : la lutte contre le virus.
_ Création de brigades « Quoiquillencout » chargées du dépistage de la population et du traçage. Pas de saupoudrage et d’effets d’annonce : on ne déclare pas la guerre en réduisant les effectifs parce que ça pèse lourd sur le budget de la dette. Si nécessaire, passage par la mobilisation.
_Mise en place d’une application obligatoire développée dans le but de recueillir quotidiennement la température des zones où la population est la plus touchée en fonction soit des données fiscales, soit de l’assurance maladie afin de toucher toute la population (l’Assurance maladie pourrait gérer cette application, même s’il manque un CDC ou un NHS à la française avec un pouvoir plus large en matière de prévention et de santé publique).
_Les résidents étrangers sont invités à télécharger l’application et de renseigner les mêmes informations sur leur santé générale. Possibilité de gérer des sorties hebdomadaires via l’application suivant des tranches horaires réservées en fonction du nombre de membres dans le foyer et de la densité de personnes à l’extérieur. (Taïwan a très bien fait ça en indiquant à la population les densités de population dans les lieux publics en temps réel.)
_Pour les personnes testées positives et/ou malades, l’application procède à un suivi redoublé et fourni des outils supplémentaires au malade : accès privilégié à un référent médical et un autre administratif, l’un pour le suivi médical, l’autre pour le traçage des cas contacts et l’aide administrative (si besoin, un troisième référent peut être ajouté : une assistante sociale ou psychologique).
_Traçage généralisé des concentrations de virus dans les eaux usées dans les zones denses où circule le virus. Mise en place de toute une brigade chargée d’effectuer ces prélèvements dans les métropoles. Pas de saupoudrage. Hors Covid, ces brigades seront toujours utiles en période épidémique pour repérer les foyers émergents.
_ Pour les zones confinées : distribution mutualisée de nourriture à partir des restaurants et des industriels du secteur de l’alimentation : la brigade de livreurs dépose d’abord dans chaque boîte aux lettres un planning de passage et un moyen de commande privilégié par le destinataire suivant quelques plate-formes spécialisées prédéfinies ou un restaurateur/magasin spécifique ; la brigade revient ensuite tous les jours relever dans les boîtes aux lettres ou devant la porte les commandes des habitants. Possibilité de former un panier fraîcheur composé à l’échelle communal à partir d’accords passés avec les producteurs et industriels locaux.
_ Pas d’attestation de sortie autre que celle pour le personnel autorisé à sortir (confinement strict, les seuls lieux autorisés sont les espaces publics ouverts) : les magasins d’alimentation générale sont appelés à continuer à travailler sans accueil du public et cela pour les produits de première nécessité : la livraison se fait par le biais des brigades de livreurs (objectif d’1 livreur pour 20 habitants).
_ Distribution de munitions : masques livrés par La Poste avec instructions d’usage. Au sein d’un même foyer, possibilité d’un maintien des gestes barrière si cas suspect ou en contact dans les jours qui précèdent avec un cas avéré. Les cas personnes malades, testées ou non positives, les cas asymptomatiques, sont séparés du reste du foyer avec mise à disposition de chambre d’hôtel.
_ Ces hôtels réquisitionnés doivent être au plus près d’un établissement hospitalier et les personnes isolées peuvent recevoir la visite de personnel médical (souvent hébergés dans les mêmes hôtels afin d’être séparés également de leur famille pour éviter de possibles contaminations).
Phase 2 : déconfinement ciblé et reprise des activités circonscrites à une même zone.
_ Seuls les départements ou villes ne disposant plus de nouveaux cas de contaminés et de nouvelles entrées à l’hôpital peuvent rouvrir (absence de transmission communautaire avérée), mais seulement dans les limites du département ou de la ville (ville pour les zones denses et fortement touchées ; département pour les zones rurales). La règle reste la limitation des déplacements interrégionaux pour limiter la propagation du virus. La circonscription du territoire reste la norme, ainsi que l’interdiction d’entrée du territoire depuis l’étranger.
_ Les voyages internationaux ainsi sont toujours restreints pour limiter les possibilités de nouveaux cas par importation. Les arrivées aux aéroports sont systématiquement suivies d’un dépistage et d’une quatorzaine avec obligation de télécharger l’application de suivi.
_ Les habitants souhaitant se rendre pour raisons personnelles dans une autre zone devront passer à leur arrivée une quatorzaine et notifier leur changement de résidence sur l’application dédiée.
_ Dans les zones déconfinées, possibilité de se rendre à son lieu de travail si télétravail impossible et si celui-ci est différent de son département/ville de résidence (autorisation de l’employeur). Mais les deux zones traversées doivent être toutes deux en phase de déconfinement ; les zones avec circulation du virus effective restent circonscrites.
_ L’industrie des zones ouvertes doit en priorité s’orienter vers la production de matériel, de biens ou de denrées tournés vers l’approvisionnement des zones fermées (« en guerre »).
_ Le fort de Brégançon devient un lieu de stockage des masques.
Phase 3 : coopération et éradication dans le monde du virus
_ Dès que dans une zone géographique non circonscrite la transmission communautaire du virus est avérée, interdiction des liaisons de passagers, quatorzaines systématiques pour les voyageurs de retour de ces zones. La même règle pour les destinations à l’étranger comme pour celle dans le territoire français : la logique sanitaire doit s’affranchir des traités. Un virus ne connaît pas de frontières.
_ Dès que l’épidémie est contenue partout dans l’hexagone, poursuite de la même politique d’éradication du virus avec les zones européennes puis internationales. Pas d’ouverture des frontières sans contrôle et sans restrictions sanitaires.
_ Aucun principe de réciprocité : l’ouverture ou la fermeture des frontières ne se décide pas en fonction de critères diplomatiques ou économiques, mais en fonction de la situation sanitaire.
_ Pour ce qui est des pays disposants de moyens de dépistage évolués, possibilité d’ouverture des frontières si le pays (ou une zone concernée si le pays circonscrit de la même manière des zones en fonction du niveau épidémique) répond aux mêmes critères établis pour les différentes zones au sein du territoire français (s’il n’y a plus de transmission communautaire avéré).
_ Pour les pays moins sûrs, tant sur le plan sanitaire que sur la mise à disposition des données sanitaires, les zones concernées doivent être considérées comme étant des zones épidémiques actives et soumises à des restrictions strictes d’entrées su le territoire (à minima, quatorzaine obligatoire).
_ Coopération possible avec les pays faisant appel à la force sanitaire mise en place pour lutter sur le territoire le temps où l’épidémie était très active et en coordination avec l’OMS. Une coopération qui devient même une nécessité si l’objectif est l’éradication du virus.
Et voilà ce qu’on a fait sous Macron chef de guerre, preuve que, cynisme absolu du politique, Macron se sert d’une crise épidémique non pas en chef d’État responsable occupé à gérer au mieux une crise, mais comme d’un tremplin personnel, un événement comme un autre, sur quoi reposera jusqu’à l’infini ce qu’il a toujours fait, de la communication :
Phase 1 : communication, communication et communication
_ Après avoir nié le risque sanitaire notamment en demandant à la population de continuer à sortir en soutien à l’économie, le chef d’État décrète un confinement généralisé sur tout le territoire, même dans les zones peu touchées : il faut frapper fort les esprits. Mais pas trop, donc on déclare une première période, et personne chez les spécialistes ne croit qu’elle sera suffisante.
_ Les masques sont inutiles parce qu’on n’en dispose pas assez. Soit, alors faisons en sorte, au moins, que ce soient les soignants qui disposent de ce matériel précieux.
_ Déclaration en grande pompe de la fabrication de milliers de respirateurs par l’industrie française (des respirateurs qui se révéleront inutilisables).
_ Des milliards d’euros seront prêtés à de grandes entreprises touchées par la crise, principalement dans le secteur de l’aéronautique et de l’automobile.
_ On appelle ces fainéants d’artistes à se réinventer.
_ Les soignants auront leurs primes… demain. Allez bosser en attendant.
_ La France des obscurantistes est fan du gourou de Marseille, alors le chef des armées rend visite à ce Raspoutine du XXIᵉ siècle pour peaufiner sa popularité et brouiller le message sanitaire (il n’y a pas de remède à la Covid, mais on va tout de même dire bonjour à son grand découvreur).
Phase 2 : l’épidémie est finie
_ Grâce au confinement, la présence du virus a presque disparu. Au lieu de viser une éradication complète, il est plus sage de rouvrir la baraque le plus vite possible pour que ça recommence comme avant (le fameux monde d’après), et donc laisser le virus circuler à nouveau (mais cette fois, promis, on se lavera les mains).
_ Ouverture au compte goutte de toutes les frontières terrestres et aériennes selon un principe de réciprocité. Pour les voyageurs venant de pays à risque, il leur est demandé de faire un test PCR dans leur pays d’origine, sinon, seule une « information sur les conditions dans lesquelles une quatorzaine doit être effectuée » leur sera délivrée à leur arrivée. Ils doivent par ailleurs présenter une déclaration sur l’honneur « qu’ils ne présentent pas de symptôme d’infection à la Covid-19 et qu’ils n’ont pas connaissance d’avoir été en contact avec un cas confirmé de Covid-19 dans les quatorze jours précédant le vol » (le fameux auto-test).
_ Le masque devient obligatoire pour faire ses courses, mais pas au travail et pas au cinéma (quand on regarde un film, le virus regarde aussi le film et n’en profite pas pour se faire la belle chez le voisin).
_ Il faut que tout le monde puisse aller en vacances pour soutenir le secteur du tourisme (et le virus, qui après plusieurs semaines de confinement, ne serait pas une petite résurgence de brassage de populations).
_ Aux États-Unis, ils ont rouvert trop tôt : les Américains sont des imbéciles. La France rouvre trop tôt : les Français sont invulnérables quand ils déposent les dates de leurs vacances.
_ Après plusieurs semaines de répit, des signes inquiétants voient le jour et la communauté scientifique tire la sonnette d’alarme. La cote de popularité du Président est au plus haut, son nouveau Premier ministre s’agite comme un fou en explosant son bilan carbone, donc où est le problème. La guerre est finie (faute d’avoir combattu).
_ Deux mois après avoir déclaré la guerre au virus, le Président prend trois semaines de vacances sur son fort dans le Var. En temps de guerre, chacun son île…