The Page Runner :
De cryptide en Scylla
L’Émulation des Titans
Le Poète en lame courte
Le Poète en lame courte
Dans la pénombre frétillante d’une fin d’après-midi, un homme assis en face d’un grand bureau emboucha le bec d’un narguilé à opium Siddons et en aspira trois ou quatre grandes bouffées aussi naturellement qu’un buveur de milk-shake.
Une voix annonça : « Suivant. Voight, Vincente. Réplicateur. Service des incorporations analogiques. »
Vincente Voight, un homme gras, aux cheveux longs et aux petits yeux tristes, s’avança au milieu de la salle, l’air assez peu rassuré.
En face de lui, l’interrogateur renifla ostensiblement sans lever les yeux de ses dossiers, puis s’éclaircit la voix.
— Asseyez-vous, dit-il.
Sur sa droite, il avait soigneusement sorti d’une pochette trois feuilles contenant des informations concernant son interlocuteur, et sur sa gauche, un classeur rouge tout neuf avait été ouvert à la première page. Il semblait prêt à entamer son interrogatoire, mais Vincente Voight fut plus prompt et déclara, évasif :
— C’est faux.
Il s’était assis et regardait autour de lui, inquiet, suspectant le pire pour un homme comme lui qui n’exécrait dans la vie rien de plus que ce qui, pour d’autres, en faisait toute la saveur : son imprévisibilité. Et Vincente Voight ignorait pourquoi on l’avait fait venir.
— Je vous demande pardon ?
— C’est faux. Je ne suis pas réplicateur, mais poète.
L’interrogateur ne répondit pas et sortit d’un étui ce que Vincente Voight reconnut immédiatement comme étant un renifleur. C’était un modèle ancien, des moins agréables, de ceux capables de vous scottifer sur place. Il se leva.
— Je préférerais écrire, se hasarda Voight. Les chiens bouillis me rendent nerveux.
— S’il vous plaît, ne bougez pas.
— Désolé.
L’interrogateur réinitialisa la tête de l’engin et la fit tourner pour s’assurer de son bon fonctionnement.
— J’ai eu un test de quotient intestinal cette année…
— … et vous avez explosé la machine. Ce n’est pas normal.
Trois hoquets successifs et le son d’une vis qui cesse soudain de tourner : des sons que Voight eût préféré ne pas entendre.
— Qu’est-ce qui est normal ?
— D’échouer aux tests.
Voight réfléchit. Sa main vint machinalement se porter à une longue mèche huileuse pour la repousser derrière l’oreille. Il déclara :
— Je n’échoue jamais… À l’écrit.
Le renifleur était prêt. Pour la première fois, Vincente vit le regard de son interlocuteur se tendre vers lui :
— La concision entre en jeu… (Il hésita et cligna nerveusement d’un œil :) À l’oral. Répondez rapidement. (Il lui fit signe de se lever.) Déshabillez-vous.
— Vous cherchez à savoir si je peux digérer le chien bouilli ou si je suis pédé ?
— Je vais vous faire un scottie rachidien pour analyser vos données chimico-organiques. Le renifleur est programmé pour une ponction coccygienne, ça prendra plus longtemps et…
Dehors, la nuit était rapidement tombée, et une réplique de Lune éclairée par le Miroir de Dioné jetait ses rayons pâles en oblique, strangulés par d’épais panneaux disposés en avant des fenêtres.
— L’avez-vous testé sur vous, professeur Kampff ?
Étonné de se trouver si tard, l’interrogateur mit un instant à réagir : comment Voight pouvait-il connaître son nom ? Il savait que Vincente Voight était susceptible de provoquer des hallucinations, il l’avait craint et il n’avait pas mis longtemps à en faire l’expérience. Il hésita à reprendre quelques bouffées d’opium, mais il ne savait déjà plus comment la drogue était censée le préserver de l’influence de Voight.
C’est déjà perdu, comprit-il. Il s’y était préparé, mais… il voulait savoir.
— Comme vous voudrez, finit-il par dire. Restez debout.
— Je n’ai pas bougé.
— Oui, je veux dire…
Le professeur Kampff retourna à son bureau, visiblement confus et, en passant devant le narguilé, pensa à une odeur de pain d’épice chaud. Un étrange sentiment de déjà-vu le saisit d’un coup, et il mit quelques instants à se reprendre après avoir regagné son siège. Il craignait de regarder Vincente Voight dans les yeux.
— Répondez… rapidement, reprit-il enfin. Le service des I.A…
— « Incorporations analogiques ». Là où je travaille.
— C’est bien ?
— Pas mal. Ça fait partie de votre test ?
Kampff se maudit à l’instant même où il posa les yeux sur Voight : en ayant voulu jouer avec innocence et détachement, il en était arrivé à ne plus savoir ce qu’il faisait. Il feignit cette fois le sarcasme et se jura de ne plus lever la tête, le temps au moins de la retrouver :
— Non. Vous disiez être poète, c’était juste pour vous chauffer…
— Je suis poète.
Le ton était tranchant. Voight n’avait pas eu besoin de lever la voix pour que le professeur Kampff sentît une vieille nausée lui parcourir les tripes. Il chercha un instant le renifleur qu’il pensait avoir rangé dans son étui, mais ce dernier était vide. Il se pencha machinalement vers le narguilé et inhala deux bouffées qui ne firent qu’accentuer son malaise.
En se redressant, il remarqua sans trop vouloir y prêter attention que la réplique de Lune avait disparu. Il faisait tout à fait sombre à l’extérieur. En face de lui, posé sur le bureau, il aperçut le classeur des procédures. Il sourit en songeant à qui les avait écrites. Voilà à quoi il devait s’accrocher pour poursuivre l’entretien. Il commença à lire aussi calmement qu’il put :
— Vous êtes sur les toits…
Mais Vincente Voigh, un sourire de pleine satisfaction aux lèvres, était en train de se rasseoir.
— Et là, c’est le test ? plaisanta-t-il.
— Oui.
Le professeur Kampff, contrarié de ne pas l’avoir vu se lever, renifla et fouilla ses poches tout en reprenant sa lecture :
— Vous êtes sur les toits…
— Où ça ? Quel immeuble ?
— Peu importe. Ce n’est qu’une hypothèse.
— J’y fais quoi ?
— Vous en avez assez du bureau des incorporations analogiques, vous voulez prendre l’air, vous évader… Vous êtes un poète.
— Ah.
Voight nota l’ironie. Il remarqua surtout les efforts de son interlocuteur pour éviter de croiser son regard, et il en éprouva d’abord un dépit amer auquel se mêla presque aussitôt, comme pour le ramener à des considérations moins terre à terre, un vertige engageant. Ce n’était pas un de ces vertiges qui nous aspirent avant la chute ou notre fin, mais un de ceux qui, au contraire, semblent secouer le monde pour nous y réintroduire vivant et euphorique.
— Un homme vous prend en chasse. Il pointe un stylet de réplication vers vous. Vous fuyez.
— Un stylet de réplication ? Pourquoi ferait-il ça ?
Le professeur Kampff se moucha, et Voight se dit que dans sa persistance à fuir son regard, il avait comme quelque chose d’un fou se parlant à lui-même. En fait, il commençait à parler tellement fort qu’on eût dit qu’il lançait des imprécations aux murs ou… qu’il s’adressait aux sourds d’une salle voisine.
— Vous n’êtes pas amateur de haïkus, monsieur Voight !… Vos poèmes sont trop longs et quelqu’un doit se charger de les couper !
Comme tout cela est triste, pensa Voight. Son regard se figea dans le vide, et presque pour lui-même :
— Un blade runner ?
— Vous en avez déjà vu ?
Le professeur désormais pleurait. Il ne savait pas pourquoi, mais il pleurait.
— Non…, concéda Voight.
N’en avait-il pas rencontré autrefois ? Impossible de le savoir maintenant. Un seul… si seulement il avait pu voir un seul blade runner… il n’aurait pas eu cette sensation, juste avant la fin, que tout allait recommencer ! Un blade runner était comme la mort. Il coupait court à toute répétition. Il était sans réplique.
— Vous fuyez, reprit le professeur. Il pleut à verse. L’homme, en vous chassant, manque de tomber du toit…
Voight voulait en finir. Il se hasarda à précipiter les événements.
— Ce sont vos questions, monsieur Kampff ou l’ami Buster les écrit pour vous ? Parce que, pour être franc, j’aurais tendance à penser que vous m’exposez là certains de vos fantasmes les plus inavouables. Vous avez songé à vous faire suivre ? Non pas que l’homosexualité refoulée soit un problème en soi…
Le professeur Kampff s’efforça de ne pas répondre.
— … il se cramponne dans le vide et s’agite pour essayer de se ressaisir. Sans vous, impossible.
— Pourquoi ? Il ne va pas y arriver en… s’agitant tout seul ?
— Ce ne sont que des questions. Et, pour vous répondre, c’est vous qui les avez écrites pour moi. Vous ne vous rappelez pas ? Le test doit… réactiver les canaux engourdis de votre mémoire, monsieur Voight. On continue ?
Voight resta sans réagir. Il faisait face à son interlocuteur, appartenant déjà à un autre monde.
— L’homme se met à gémir et appelle sa mère.
— Sa mère ?… Vous êtes dégoûtant !
— Vous vous approchez tel un loup. Vous hurlez. C’est vous désormais qui le tenez. « Maman ! Maman ! » pleurniche-t-il encore. Vous lui tendez la main et l’aidez à remonter sur le toit.
Voight laissa échapper un rire :
— Il a enfin trouvé sa maman, le petit andro ?
— Ne plaisantez pas.
— Et pourquoi l’aider ?! Je lui mords les doigts pour qu’il tombe, oui !
— C’est humain. Un poète n’est-il pas capable de comprendre cela ?
— Un poète ?
— Nous parlons de vous, monsieur Voight. Voudriez-vous que nous parlions un peu de poésie ? Nous sommes entre hommes, après tout. Voulez-vous écrire quelques vers ? Tenez, vous n’aviez jamais achevé celui-ci, et c’est pourtant mon préféré. (Il récita :) J’ai vu des choses que vous autres ne croiriez pas. Des vaisseaux en flammes sur le Baudrier d’Orion. J’ai vu des rayons cosmiques scintiller près de la Porte de Tannhäusser.
— C’est beau, admit Voight, mais ce n’est pas de moi.
— C’est vous qui l’avez écrit. Janvier 2016.
— Moi ? Je ne crois pas. Je m’en souviendrais.
— Peut-être pourriez-vous en imaginer une suite…
— Attendez, vous dites… 2016 ?
— L’année de votre mise en service.
— Oui.
Vincente Voight se rendit compte qu’il avait parlé trop vite. La rapidité… Des bribes de mémoires lui revinrent petit à petit. Les deux hommes se regardèrent sans rien dire. Kampff semblait peiné. Il précisa :
— Nexus-2. Modèle « roi » d’expérimentation. Autonomie maximum. Mémoire reproductible. Mise en service, 2016. (Il ironisa :) Votre période bleue.
Vincente Voight répéta, comme pour lui-même, afin de mieux en saisir la portée et le sens : « Autonomie maximum… Mémoire reproductible. »
Puis, songeur, il demanda :
— En quelle année sommes-nous, professeur ?
— En 2033. Pourquoi cette question, monsieur Voight ?
— Pour rien.
Voight marqua une pause avant de reprendre :
— Puis-je vous répéter la question ?
— Quelque chose ne va pas ?
— Je veux juste m’assurer d’une chose. En quelle année sommes-nous ?
— Eh bien, nous sommes en 2140. En quelle année pensez-vous que nous sommes ?
— Que nous sommes ? répéta, amusé, Vincente Voight.
— Très bien. Je vois que vous commencez à comprendre pourquoi vous êtes là. Car en réalité, monsieur Voight, le temps n’est rien. Du moins pour vous. Nous devrions être précisément en…
— Attendez, c’est vous qui ne comprenez pas. Je vous l’ai dit, je suis meilleur à l’écrit. Écrivez-le-moi.
Et sur le morceau de papier que lui tendit le professeur Kampff était inscrit : « 1966 ».
— Parfait, dit-il. Maintenant, écrivez-moi où nous sommes.
Après quelques secondes, Voight put lire : « Centre de recherche. Hôpital militaire de Fairhill, Cleveland, Ohio ».
— Où êtes-vous, monsieur Voight ?
— Sur Titan. À la Rosenchild Company. Quarante-sixième étage. Mon service des I.A est au quatrième sous-sol.
Il laissa un temps, puis :
— Votre nom ?
— Vous l’aviez vous-même deviné : Peter Kampff.
— Écrivez…, insista Voight.
Kampff obtempéra et, quelques instants plus tard, Voight put lire : « Entité ». Il allait montrer le papier au professeur, mais ce dernier lui assura en souriant poussivement qu’il préférait ne pas savoir. Il reprit plutôt une bouffée d’opium Siddons.
Maintenant qu’ils semblaient se « comprendre », le professeur Kampff essaya d’en savoir plus en décrivant ce qu’il savait du problème :
— Le test est censé réactiver les canaux temporels que vous avez endommagés. Vous rappelez-vous avoir inventé une machine capable de désynchroniser certaines parcelles du temps ?
— Je me rappelle avoir travaillé sur un modèle de réplicateur schozi. Les Soviétiques s’apprêtaient à mettre au point leur orgue d’humeur Tipomoff, et l’OTM craignait de voir les citoyens s’en munir. Un réplicateur était censé… Attendez, non, ce n’est pas ça. Certaines choses me reviennent en mémoire…
— Qu’était censée répliquer cette machine et pourquoi les renifleurs sont-ils devenus inopérants quand ils ont muté vers leur dernière mise à jour, monsieur Voight ?… Si votre modèle est une machine capable de se retourner contre les machines, y a-t-il un moyen de revenir à une configuration précédente pour en annuler les effets ?… Est-ce nécessaire que je vous l’écrive ?
— C’est trop tard, ça ne servirait à rien. Qu’est-ce qu’est censée répliquer la machine ?… Certains événements du passé, des rêves, des poèmes, des parcelles de lumière emprisonnées dans la nuit. Strictement identiques. Comme deux gouttes d’eau jetées à la mer.
Il réfléchit un instant, puis insista en regardant, résigné, le professeur Kampff :
— Une franchise. Une saloperie de franchise appliquée au temps. Nous n’étions plus seulement capables de reproduire des gènes, des programmes, des machines, mais aussi, maintenant, le temps. Rêveriez-vous de revivre l’instant de votre naissance ? De votre mort ? Relire pour la première fois votre roman favori ?… Retrouver votre femme le jour de votre première rencontre ? Ou préfériez-vous assister aux grandes dates de l’histoire en imaginant encore pouvoir en changer le cours ?… Tout cela est devenu réalité. Les blade runners seront bientôt obsolètes. Ou plutôt, ils le sont déjà. Le temps est partout : il s’est échappé. Rien de ce qui est éphémère et unique ne pourra être préservé. On ne préserve plus : on réplique. Et cela ne peut se faire sans séquelles.
Le professeur acquiesça. La fin du poème de Voight lui revenait en tête, il récita :
— Tous ces instants seront perdus dans le temps comme des larmes dans la pluie…
Mais le poète, lui, n’avait plus qu’une idée qui lui revenait inlassablement en tête : « Autonomie maximum ». Il comprenait ce que cela signifiait : que tout devait s’arrêter pour être reformaté et que, lui, continuait. Parce que, lui, bien que réplicant, était encore un homme, et que tout le reste, dans sa franchise, devait disparaître.
Alors, sans trop réfléchir, quelques mots s’imposèrent à lui. Il récita à son tour pour que le professeur Kampff pût entendre :
— Qui qu’ait été ma mère, je dois survivre. Sous quelque forme que ce soit. Préserver au moins ma mémoire.
Le miracle de la vie… Reproduction sans réplique.
Et il répéta en fixant le professeur : « Autonomie maximum ».
Enfin, calmement, comme annonçant la mort à sa prochaine victime, il dit presque en larmes :
— Vous arrivez à expiration, monsieur Kampff.
D’un bond, il se jeta sur son interlocuteur, lui agrippa la gorge, puis l’étouffa. Avant que les convulsions ne cessent, Vincente Voight se saisit de la nuque de sa victime et la brisa d’un geste sec et brusque avant de reposer délicatement le corps sans vie sur le sol.
Une raie de lumière ocre s’échappa des épais nuages derrière les vitres du quarante-sixième étage du bureau de la Rosenchild Company. Voight, un temps ébloui, rejoignit la terrasse, ouvrit l’écran qui faisait office de grande porte vitrée. Dehors, derrière le panneau incandescent d’où lui était parvenue la lumière, il n’y avait qu’un désert aride traversé par une unique piste filant à l’horizon.
Il sortit de sa poche le renifleur volé au professeur Kampff, le regarda comme pour y consulter l’heure, et le jeta par la fenêtre. Dix mille cinq cents ans que Vénus et la Terre avaient disparu. Une poussière dans le grand organisme du temps, songea Vincente en regardant s’éteindre le ciel flamboyant du crépuscule. Combien de fois le soleil s’était-il levé sur ces terres lointaines ? Combien de fois sa réplique, le Miroir de Dioné, tournerait-elle encore pour baigner de lumière une région de Saturne où aucune vie terrestre n’avait survécu ? Combien de temps le soleil se lèvera-t-il encore ? Il le savait, le soleil engloutira tout avant de sombrer, et tous les détails de la vie compris entre ces premiers levers de soleil et le dernier auront disparu. C’était pour bientôt. Seuls resteront alors les escabeaux mécaniques partis sonder les profondeurs de l’espace. Et parmi eux, un seul parviendra à son but. Saladin S73 sera recueilli par une forme de vie très ancienne, et elle reconnaîtra en ce messager de l’espace, la machine qu’elle n’a jamais cessé d’être, portant en elle, les paillettes conservées d’une vie microscopique, lointaine cousine de celle qui s’était développée dans ce lointain système. La vie aura alors retrouvé sa mère nourricière. La vie aura alors achevé son parcours et sa quête effrénée pour survivre, et elle pourra se dire, enfin : « Je ne sais pas où je vais, mais je sais d’où je viens ». Et trois autres milliards d’années l’attendront, là-bas, près des siens.
Il faisait tout à fait nuit à présent, et Voight n’avait pas quitté des yeux la piste qui s’étalait au loin, dans la poussière. Il finit par remarquer un transport automate lui rappelant la forme d’une tortue. Il lui rappelait celui qu’il avait emprunté, lui et six de ses compagnons, pour quitter, il y a bien longtemps, l’enceinte de Mars-Cambray. Ce jour-là, pour les convaincre tous, il avait fait le poète : « N’est esclave que celui qui renonce à ne plus l’être. » Et il rit. Combien de fois avait-il vécu cet épisode sans se rendre compte qu’une telle phrase ne voulait rien dire ? Pourtant, n’était-ce pas ça la particularité de la vie ? Celle d’être libre sur un malentendu, d’exister par un échec, quand les machines n’étaient, elles, capables de reproduire que ce qui marche ?
Quarante-six fois, il leur avait répété cette bêtise, et chaque fois, ils s’étaient laissé convaincre de le suivre. Qu’était-il ? Réplicateur ou producteur ?
Qu’importe. Pour lui, la poésie était morte.
Bientôt, sa mémoire se réorganiserait, et il se retirerait pour recommencer.
Une quarante-septième fois.
Réplique après réplique, toujours la même quête.
Le blade runner renaît.
Réplique après réplique, maintenant, c’était lui.
Le dernier.
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Toute réplication, même partielle, au cinéma ou ailleurs, ne saurait être autre chose que de la fanfiction. Blade Runner est sans réplique. Plus brève est sa flamme, plus vif est son éclat.