Les Indispensables du cinéma 1932

Introduction, principes et index

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Les 5 films de l’année 1932 :
  1. Freaks, Tod Browning
  2. Haute Pègre, Ernst Lubitsch
  3. Scarface, Howard Hawks
  4. Vampyr, Carl Theodor Dreyer
  5. Je suis un évadé, Mervyn Leroy

Au programme :

L’époque est au précode et aux films d’horreur. De retour à la MGM après un prêt chez Universal où il a réalisé l’adaptation à succès de Dracula, Tod Browning se voit confier la mission de réaliser un film encore plus horrifique… Le studio ne sera pas déçu : Freaks est charcuté au montage pour ne pas heurter le public, le film est interdit dans de nombreux endroits et restera invisible pendant de longues décennies. Tod Browning ne retrouvera plus jamais le succès.

Un an avant King Kong, Ernest B. Schoedsack met déjà Fay Wray en scène dans un film exotique et d’horreur ayant lieu sur une île perdue : La Chasse du comte Zaroff. C’est aussi peut-être le premier succès de la RKO avec Joel McCrea (la même année, il apparaît dans un autre film d’île exotique : L’Oiseau de paradis). Après le succès de Frankenstein, Universal, le plus allemand des studios américains, demande au célèbre directeur de la photographie de Metropolis, Karl Freund, de diriger Boris Karloff dans La Momie. Quant au réalisateur James Whale, il retrouve son acteur de Frankenstein sur Une soirée étrange. Le film marque également les débuts à Hollywood de Charles Laughton : la même année, l’acteur britannique apparaît dans une adaptation du classique de l’horreur de H.G Wells, L’Île du Dr. Moreau, pour le compte cette fois de la Paramount ; après Boris Karloff, il est cette fois opposé à Bela Lugosi. Presque trente ans avant Spartacus, on voit Charles Laughton également dans un péplum réalisé par Cecil B DeMille : il interprète Néron dans Le Signe de la croix.

Après Le Petit César, tourné l’année précédente, Mervyn Leroy réalise un film-choc pour la Warner sur les conditions de vie des forçats et sur le système judiciaire américain : Je suis un évadé. Paul Muni en est la star. La même année, il est l’acteur vedette du Scarface de Hawks. Avant que William Powell ne rejoigne la MGM pour faire la paire avec Myrna Loy, l’acteur quitte la Paramount accompagné de Kay Francis avec qui il tourne deux films pour la Warner : Jewel Robbery et Voyage sans retour.

À la Paramount, on invoque les démons de la Seconde Guerre mondiale : Frank Borzage adapte Ernest Hemingway avec Gary Cooper (L’Adieu au drapeau) et Lubitsch réalise L’Homme que j’ai tué. Le réalisateur berlinois poursuit également sa collaboration avec Miriam Hopkins et Maurice Chevalier : pour la première, dans Haute Pègre, pour le second, dans Une heure près de toi. L’acteur français apparaît aussi dans un film de Rouben Mamoulian : Love Me Tonight. Marlene Dietrich et Josef von Sternberg tournent Shanghaï Express et Blonde Vénus. Et enfin, le studio mise à nouveau sur les Marx Brothers pour diversifier leur catalogue et chatouiller l’humeur du public avec Plumes de cheval.

Loin des horreurs du début du cinéma parlant, la MGM mise toujours sur les stars et le glamour : Edmund Goulding est chargé de faire cohabiter sur une même affiche Greta Garbo et une poignée d’autres vedettes du studio dans Grand Hôtel. Moins glamour, le studio au lion surfe sur la mode des films exotiques et adapte le Tarzan d’Edgar Rice Burroughs avec l’ancien médaillé olympique Johnny Weissmuller. La MGM réunit pour la première fois Clark Gable et Jean Harlow dans La Belle de Saïgon (ils partageront en tout cinq fois le haut de l’affiche). L’actrice tourne également pour le studio dans La Femme aux cheveux rouges.

À la Columbia, Frank Capra retrouve Barbara Stanwyck sur La Grande Muraille et sur Amour défendu/Une vie secrète, puis rend presque la vie belle à Walter Huston dans La Ruée.

Si à Hollywood, le cinéma met l’horreur à l’honneur, en Europe, la veine expressionniste éteinte, on ne s’en laisse pas pour autant compter : après quatre ans d’absence, Carl Theodor Dreyer réalise Vampyr, son premier film sonore.

En France, Marcel Pagnol poursuit sa trilogie avec Fanny. Après Tire-au-flanc et surtout La Chienne, Jean Renoir et Michel Simon se retrouvent pour Boudu. Jean Renoir est le premier à adapter Georges Simenon à l’écran : La Nuit du carrefour (son frère Pierre est le premier à incarner Maigret à l’écran). Duvivier, après David Golder, met à nouveau Harry Baur en scène et adapte pour une seconde fois Poil de carotte. Ce n’est pas encore l’époque du Front populaire, mais ça y ressemble, et comme au temps du muet, un autre versant du cinéma français pointe parfois le bout de son nez : plus expérimental, financé par des mécènes comme Charles de Noailles, ça donne Le Sang d’un poète de Jean Cocteau. L’écrivain participera à quelques scénarios pendant l’Occupation, mais il faudrait attendre 1946 pour voir son prochain film. De son côté, Raymond Bernard revisite l’horreur des tranchées dans Les Croix de bois.

En Allemagne, la Grande Dépression fait rage (Ventres glacés), mais Leni Riefenstahl reste perchée sur ses montagnes (La Lumière bleue).

Au Japon, c’est la Shochiku qui est à la manœuvre. Le shomingeki se cherche encore entre la comédie et le mélodrame, mais le style se tourne résolument vers le naturalisme, et la classe populaire est à l’honneur. Yasujirô Ozu tourne ainsi Gosses de Tokyo et Mikio Naruse Sans liens de parenté. Le cinéma parlant ne s’est toujours pas imposé dans l’archipel.

En Italie, Mario Camerini et Vittorio De Sica entament une collaboration longue de plusieurs années avec Les hommes, quels mufles !


Freaks, Tod Browning | MGM


*Indice de notoriété

Freaks, Tod Browning

1 414 416*

Haute Pègre, Ernst Lubitsch

680 000

Scarface, Howard Hawks

585 200

Vampyr, Carl Theodor Dreyer

494 172

Je suis un évadé, Mervyn Leroy

440 832

Gosses de Tokyo, Yasujirô Ozu

178 935

Love Me Tonight, Rouben Mamoulian

127 800

Boudu sauvé des eaux, Jean Renoir

94 900

Shanghaï Express, Josef von Sternberg

86 067

Le Sang d’un poète, Jean Cocteau

82 782

Livreurs, sachez livrer !, James Parrott

79 632

Plumes de cheval, Norman Z. McLeod

76 950

Grand Hôtel, Edmund Goulding

52 852

L’Île du Dr. Moreau, Erle C. Kenton

46 990

La Chasse du comte Zaroff, Irving Pichel & Ernest B. Schoedsack

38 695

Une soirée étrange, James Whale

35 000

La Momie, Karl Freund

21 000

Une heure près de toi, George Cukor & Ernst Lubitsch

18 744

Blonde Vénus, Josef von Sternberg

17 750

Les Croix de bois, Raymond Bernard

14 245

Fanny, Marc Allégret & Marcel Pagnol

13 650

La Grande Muraille, Frank Capra

11 385

L’Homme que j’ai tué, Ernst Lubitsch

9 120

Les Morts-Vivants, Victor Halperin

8 184

Ventres glacés, Slatan Dudow

7 656

Voyage sans retour, Tay Garnett

7 050

L’Adieu au drapeau, Frank Borzage

6 912

La Belle de Saïgon, Victor Fleming

4 896

Symphonie matinale, Burt Gillett

4 672

Poil de carotte, Julien Duvivier

4 500

Le Signe de la croix, Cecil B DeMille

4 488

La Nuit du carrefour, Jean Renoir

4 225

Tarzan, l’homme singe, W.S. Van Dyke

4 200

La Femme aux cheveux rouges, Jack Conway

3 780

Histoire d’un amour, John M. Stahl

3 080

La Lumière bleue, Leni Riefenstahl

2 448

L’Idée, Berthold Bartosch

1 632

La Ruée, Frank Capra

1 480

Jewel Robbery, William Dieterle

1 440

Les hommes, quels mufles !, Mario Camerini

1 224

Forbidden

Amour défendu, Frank Capra

966

Sans liens de parenté, Mikio Naruse

828

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