Kinji Fukasaku

Kinji Fukasaku

 

Ce qu’il y a de reposant chez Fukasaku, c’est que c’est toujours la même chose. Je capte que dalle aux histoires des yakuzas, mais il suffit de comprendre que c’est une bande d’agités contre d’autres agités. Tout l’intérêt de la chose, c’est cette sorte de composition presque chorégraphique du chaos. À première vue, ça ne ressemble à rien, des types qui se tapent dessus. Sauf que tout est charcuté au millimètre. Seuls le rythme et l’atmosphère comptent alors et, à l’intérieur de ça, c’est du rock’n’roll. Jamais une note de trop ; la caméra est toujours là où il faut, quand il faut.

Ensuite, c’est dirigé au métronome. Alternance entre les séquences boom boom où ça pétarade et les séquences plus feutrées. À l’intérieur même des séquences, il arrive à changer de rythme, preuve d’une grande maîtrise sur la question (on aurait tendance à confondre rythme et vitesse, alors que le sens du rythme, ce serait plutôt cette capacité à varier le tempo, à savoir jouer des ruptures, des moments de suspension, des relances, des accélérations). Pas besoin de comprendre, c’est de la musique.

Son style ne semble pas avoir changé d’un iota en quarante ans. Je n’aime pas Nolan, mais il y a un peu du réalisateur d’Inception chez lui. Nolan maîtrise beaucoup moins bien les changements de rythmes, mais il y a la même conception syncopée du montage, une préférence pour les gros plans, une caméra mobile pour changer rapidement d’angle (et utilisation du zoom si nécessaire) et une utilisation constante (là, je peux me tromper, n’étant pas spécialiste de la photo) des longues focales pour enfermer les personnages dans le cadre et réduire l’espace visible autour d’eux (ce qui a pour effet d’augmenter le hors-champ et de nous pousser à imaginer ce qu’on ne voit pas au-delà des bords du cadre). À l’image du Parrain à la même époque dont la réalisation parait toujours aussi moderne, là ça fait la même chose, vu que beaucoup de réalisateurs continuent d’utiliser ce type de mise en scène. Il ne prend pas une ride, le Mick Jagger de la caméra.

Pour Battle Royale, certains s’étonnaient quand on leur donnait l’âge du type qui avait réalisé le film. Imagine-t-on Manoel de Oliveira réaliser un James Bond ? (il n’est pas trop tard d’ailleurs Manoel !).

Fukasaku a aussi réalisé La Marche et Sous les drapeaux l’enfer. On est loin des yakuzas. Le premier est une comédie absurde ; le second, une enquête sur un disparu de guerre. On y retrouve pourtant la même densité (de mémoire, la réalisation repose moins sur le montage et la chorégraphie du chaos). Les ambiances n’ont rien à voir.

Classement : 

10/10

9/10

  • Battle Royale (2000)

8/10

  • Le Cimetière de la morale (1975)
  • Sous les drapeaux, l’enfer (1972)

7/10

  • La Marche de Kamata (1982)
  • Battles Without Honor and Humanity I / Combat sans code d’honneur (1973)
  • Battles Without Honor and Humanity II / Qui sera le boss à Hiroshima ? (1973)
  • Battles Without Honor and Humanity III (Proxy War) (1974)
  • Battles Without Honor and Humanity IV (Police Tactics) (1974)

6/10

  • Shogun Samourai (1978)
  • Le Lézard noir (1968) **

5/10

  • La Maison des geishas (1998) *
  • Battles Without Honor and Humanity V (Final Episode) (1974)

*Film commenté (article) :

**Film commenté (court article)