Bad Axe, David Siev (2022)

Note : 4 sur 5.

Bad Axe

Année : 2022

Réalisation : David Siev

Poursuite de la rétrospective « American Fringe » à la Cinémathèque. L’occasion de voir souvent des films seuls dans la salle. Ici, on était une trentaine, dont la moitié semblait être des équipes des autres films (la réalisatrice de Black Barbie était présente et papotait sans honte avec sa voisine).

Une petite pépite en tout cas. Les documentaires personnels, il ne faut jamais hésiter à y aller à fond : ils seront toujours le témoignage d’une époque. On est entre Taming the Horse/Comme un cheval fou et Minding the Gap. Un jeune cinéaste new-yorkais « profite » de la pandémie pour retourner auprès de sa famille qui tient un restaurant dans un coin perdu de l’État voisin. C’est sans doute le cas de beaucoup de créateurs de 2020, il se met à filmer ce qu’il voit sans cacher sa présence à ses parents ou à ses sœurs bien démunis face d’abord aux conséquences sur leur activité, puis face au désordre social ayant agité les divers pans de la société américaine.

Toute une première partie évoque donc les difficultés auxquelles doivent faire face les parents restaurateurs du cinéaste en pleines restrictions sanitaires et fermetures de commerces. Et puis, une fois que l’on pense que les affaires vont pouvoir reprendre à l’été de la même année, la famille doit faire face au public pro-Trump récalcitrant à porter un masque et le fait savoir, puis, c’est l’assassinat de George Floyd qui scinde un peu plus la société américaine en deux, en particulier cette petite communauté de la côte est des États-Unis.

La sœur du cinéaste se montre par exemple très engagée, remontée contre les suprémacistes de la région, et cela aura des répercussions sur la sécurité de la famille. Face à la bêtise raciste ordinaire et souvent menaçante, le cinéaste choisit d’y opposer l’histoire de son père échappé du génocide au Cambodge.

Jusque-là, le film était déjà très convaincant, mais le cinéaste aurait alors produit une première monture du film qui aurait fait parler et il n’en aurait pas pour autant cessé de filmer sa famille. C’est désormais les conséquences sur sa famille du film réalisé sur et avec eux qu’il filme puisqu’elles ne sont pas loin d’être dramatiques. Retournement heureux, à l’américaine, on pleure (bien aidé toutefois par une musique un peu trop présente, mais bon, c’est la loi du genre) et on applaudit.

Ma voisine semble avoir apprécié. David Siev a réussi là où elle, réalisatrice de Black Barbie, avait renoncé à se rendre. Une fois qu’on s’embarque dans un film personnel, il ne faut plus s’embarrasser de pudeur ou de fausses excuses (sans compter que le documentaire « sur le vif » est bien plus vivant qu’un documentaire statique basé sur des témoignages et un décor installé).


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