Dans la Poire

Les Bas-Fonds de Frisco

Titre original : Thieves’ Highway
Année : 1949
Réalisation : Jules Dassin
Avec : Richard Conte, Lee J. Cobb, Valentina Cortese
— TOP FILMS —
Décidément, je me découvre une passion tardive pour les films de Jules Dassin. Un film noir réaliste ou un thriller naturaliste, c’est selon, comme Naked City. Des aspects parfois difficiles à marier, mais qui sont particulièrement réussis dans le film. Nick dit à son père que ce n’est qu’une « poire », il avouera plus tard qu’il en est une aussi, et c’est toute la tragédie des petites gens honnêtes illustrée tout du long ici. Péripétie après péripétie ; emmerde après emmerde. À l’image de Stavros dans America America, certains ont plus de talent que d’autres pour s’attirer la guigne. Naïfs, voire un peu stupides, on sent toujours venir l’escroquerie, on voit tout, et c’est ce suspense qui rend leur destin tragique. Et puis, au milieu de ces ennuis érigés en septième merveille de l’univers, le contraste le plus inattendu, l’aide inespérée, la vamp (parfois, c’est un ange, comme dans Body and Soul). Mais celle-là, si elle joue d’abord contre lui, notre héros guignard, elle se trouve très vite un intérêt pour lui. Le charme du beau naïf qui n’existe qu’au cinéma. Femme pas si fatale que ça, au contraire, c’est comme si la mort même s’entichait de la pauvre pomme qu’elle était chargée de ramasser. Le coup de génie est d’avoir choisi Valentina Cortese pour le rôle. Étrange créature au charme pas évident, à l’accent et au regard indéfinissable. Tout paraît trouble en elle, sauf le sourire. Un sourire comme ça, ça ne ment pas (comme celui de Richard Conte qui lui donne bien un petit air idiot). C’est réaliste, c’est cruel, et pourtant, ça reste du cinéma.
(J’ai vu aujourd’hui Pain, amour et fantaisie, avec De Sica, et il y a de ça dans ce film : un peu de De Sica, d’espoir niais, mais juste, au milieu d’un cageot d’ennuis et de misère.)
Belle maîtrise également dans le traitement des personnages, car en dehors de celui qu’interprète Lee J. Cobb, ils flirtent en permanence entre les lignes pour définir ce que nous sommes tous, des êtres multiples et imprévisibles. La chasse aux stéréotypes, aux sorcières, aux étiquettes…
Ed est d’abord présenté comme un petit escroc, puis prouve que c’est tout de même un brave type en sauvant Nick de la mort. Nick lui-même vacille entre son côté « poire » et sa volonté de se faire un peu de blé rapide. Les deux emmerdeurs qui suivent Ed comme la mort finiront bien pour lui porter la poisse, mais ils viendront à son secours, et au moment de jouer les croque-morts, ils font même sécession. La petite amie de Nick est présentée comme la poule idéale jusqu’à ce qu’elle montre son vrai visage. Et Rica bien sûr… Quant à Lee J. Cobb, pour en revenir à lui, peut-on imaginer meilleur acteur pour interpréter une enflure ? On sait qu’il parviendra malgré tout à le rendre sympathique, donc un escroc crédible (Lee J. Cobb, dix ans plus tard, c’est tout simplement l’une des performances les plus mémorables du cinéma dans les Frères Karamazov de Richard Brooks ; encore un personnage négatif qu’il arrive à rendre sympathique.)






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