Michael Powell

Michael Powell

(Souvent avec son acolyte Emeric Pressburger)

Classement : 

10/10

9/10

8/10

  • Je sais où je vais (1945)
  • A Canterbury Tale (1944)

7/10

  • Le Narcisse noir (1947)
  • Les Chaussons rouges (1948)
  • Une question de vie ou de mort (1946)
  • L’Espion noir (1939)
  • Espionne à bord (1940)

6/10

  • Le Voyeur (1960)
  • Le Colonel Blimp (1943)
  • 49ème Parallèle (1941)

5/10

  • Le Voleur de Bagdad (1940)
  •  À l’angle du monde (1937)

4/10

  • La Renarde (1950)
  • Return to the Edge of the World (1978)

3/10

Simples notes :

La Renarde (1950)

Affreusement pénible à voir. Tout le contraire du film précédent. Si l’on pardonne au Canterbury Tale ses défauts, c’est que le sujet et les personnages valaient le détour. Dans La Renarde, pas un personnage n’est à sauver. Il ne suffit pas d’être une femme pour proposer des histoires mettant en scène des personnages en quête d’indépendance et capables de casser les archétypes propres à la perpétuation d’une double domination : celle des hommes sur les femmes, et celles des puissants sur les pauvres. Hazel est une sorte de Carmen sans panache, la stéréotype de la femme sauvage qui s’éprendra d’un con. Hazel est forcément jolie, et les deux hommes qui la convoitent sont forcément deux notables des environs (ce qui fera bien rire le père, lui-même archétype du veuf pauvre n’ayant strictement rien à foutre de sa fille unique ; il est sans doute l’idiot du village du film précédent qui se serait égaré dans le suivant…) prétendre s’être épris de la donzelle au premier coup d’œil. Les incohérences dans le Canterbury Tale, on les pardonne. Ici, non, parce qu’au lieu de servir une singularité, ce n’est que pour appuyer des archétypes pitoyables : deux hommes riches tombant amoureux au même moment de la même femme pauvre. Et comme la femme en question est sauvage, elle promettra le mariage au premier (le sage, et le sage dans une histoire à la con est tenu par un homme d’Église) tout en se donnant au second (c’est que celui-ci a tous les attributs du mâle toxique, violent et manipulateur, donc tu comprends, c’est super sexy). Rarement vu un truc aussi rétrograde au cinéma. Hazel aurait des couilles, une vraie Carmen, ou une Scarlett, elle serait maîtresse de son destin, assumerait ses bêtises et agirait comme une adulte. Tout le contraire ici : il suffit de lui dire qu’on l’aime pour la convaincre de nous suivre, elle lance des promesses à la con (se marier avec le premier homme qui lui demanderait sa main… mais what ?), elle se fait baptiser par son homme parce que pourquoi pas, un autre homme vient la tirer de son foyer, et là comme ça, ça lui vient tout d’un coup, elle se rend compte qu’elle aime ce type qui vient toquer à sa porte. Et quand le mari vient finalement toquer à l’autre porte (celle de l’amant), alors que la donzelle s’amuse à courir dans les champs en robe de soirée et à moquer le domestique qui lui avait évité un viol (sympa la reconnaissance) elle sort un « oh ciel, mon mari… OK, bah finalement, je retourne à la maison ». Parce que pourquoi pas. Qui peut apprécier un personnage avec si peu de caractère ?…

A Canterbury Tale (1944)

Un peu barré comme film. Jouer la carte de la singularité, ça passe ou ça casse. Et comme tout est charmant dans le film, il n’y a pas à beaucoup se forcer pour accepter les étrangetés scénaristiques de cet objet non identifié. Il y a pourtant de quoi être un peu perdu entre les fausses pistes, l’enquête improbable menée par une travailleuse agricole, un soldat américain et un autre, anglais, semblant à peine superviser les deux autres pour venir à bout d’un malotru se permettant de foutre de la colle dans les cheveux à la première femme venue ne respectant pas le couvre-feu particulièrement imposé aux femmes dans la ville. Surtout, ne pas faire du juge ayant édicté cette loi ridicule le premier suspect… On se fout pas mal des incohérences, d’ailleurs, on se fout pas mal de l’histoire. Et paradoxalement, on peut même dire que ce sont toutes ces étrangetés offrant au récit ces situations bizarres (sans la moindre note fantastique ou onirique pourtant) qui donnent au film sa tonalité si singulière. Dans une structure narrative hollywoodienne, tout aurait un but, tous les fils du récit mèneraient à une même logique qui se conclurait au dénouement. Ici, c’est presque même le contraire : on s’attend d’abord à suivre une histoire de rencontre amoureuse des plus banales, alors que la relation entre les deux protagonistes se contentera d’être platonique. Il y aurait même un côté presque naïf, comme dans un film pour enfant, à ne jamais évoquer la possibilité (même entre eux) d’une relation. On y songe peut-être un moment quand le soldat demande la couleur des cheveux de la travailleuse agricole, mais l’étrangeté du film, c’est bien qu’on lance cette piste et n’y revient plus du tout par la suite (la faiblesse narrative devient donc une qualité). Étrangement donc, une fois que l’enquête a été résolue, tout ce petit monde se rend à la cathédrale et chacun vient un peu y trouver ce qu’il attendait et n’espérait plus (c’est le sens de la procession qui avait lieu quatre siècles plus tôt, et connaissant un peu les deux bonhommes à la manœuvre, c’était sans doute le point saillant de leur histoire et le reste n’était que prétexte – un prétexte pour le moins loufoque).