Chasseurs de truffes, Michael Dweck, Gregory Kershaw (2020)

Note : 4 sur 5.

Chasseurs de truffes

Titre original : The Truffle Hunters

Année : 2020

Réalisation : Michael Dweck, Gregory Kershaw

Chantal Ackerman trouve un trésor en fouillant son grenier : une GoPro. La truffe animale filme des plans fixes à petite focale interminable, assaisonne la gourmandise d’une jolie omelette voguant à rase-motte et, la truffe à l’air, se met en quête d’un autre de ces trésors olfactifs qui fera bientôt le délice de riches gourmets…

Jeanne Dielman peut se rhabiller avec ses pommes de terre.

Parfois un peu trop mis en scène (le dernier plan ne trompe pas, c’est de la fiction plus que du documentaire ; il faut sans doute être un peu escroc parfois), mais c’est pour la bonne cause. Les bêtes nous écoutent sans comprendre, poliment, comme nous, on écouterait de vieux Piémontais sans les sous-titres.

Le côté fabriqué ou documentaire orienté (je ne dirais pas « fiction dans la fiction ») est surtout gênant dans le dernier plan, dans les lettrages, voire dans les lumières (on remarquera l’écriture et les teintes brunes à la Godfather d’un goût assez douteux), et peut-être dans les quelques scènes de négociation, qui là encore font un peu trop penser à un film de mafia. C’est à la fois le plus grand défaut du film, mais aussi sa principale qualité : ce n’est pas un documentaire, mais une escroquerie. Je le répète souvent, au cinéma, ça passe et ça me fascine. Tout simplement parce que les mises en place à la limite du grand angle, assez lentes, de face à la Wes Anderson, où comme par hasard il se passe un truc qui rentre dans le cadre d’un documentaire “narratif”, c’est du cinéma, c’est forcément fabriqué, mais on ne voit pas les coutures : c’est gros, mais ce n’est pas de l’improvisation. Il est donc difficile de dire comment les réalisateurs s’y sont pris pour orienter les divers “acteurs” de la fable.

D’ailleurs, je suis persuadé qu’on retrouve ce côté fabriqué et narratif dans L’Argent du charbon (ce serait amusant d’ailleurs de comparer les deux produits : charbon contre truffe). À quel point les “acteurs” acceptent-ils ainsi que la caméra les filme ? Que se passe-t-il si un des deux ou trois acheteurs dit au réalisateur : « désolé, ne me filmez pas ». Le film tombe à l’eau. J’ai quand même un peu dans l’idée qu’il a dû leur donner une petite compensation financière. Dès que ça raconte un peu trop bien une histoire, un documentaire est suspect. Le dilemme, c’est que ça les rend plus intéressants. Comme avec les dopés, le tout est de ne jamais se faire prendre par la patrouille… Après, ces deux films sont particuliers, ils jouent sur une ambiance et un récit autour d’un sujet unique. On arrive en général à ce résultat avec des milliers d’heures de rushs, tandis que dans Les Chasseurs de truffe et dans L’Argent du charbon, ils sont limités en plans : tu rates l’événement, tu ne le prépares pas : plus de film.

Jolie pépite, donc, qui sent bon la fraîcheur des bois (à défaut d’avoir la moindre idée de ce à quoi peut ressembler l’odeur de la truffe).


Chasseurs de truffes, Michael Dweck, Gregory Kershaw 2020 The Truffle Hunters | Beautiful Stories, Artemis Rising Foundation, Bow and Arrow Entertainment


Sur La Saveur des goûts amers :

Top des meilleurs films documentaires

Listes sur IMDb : 

MyMovies : A-C+

Liens externes :